Guerre suisse

L’Hebdo
– 28. juin 2007
Ausgaben-Nr. 26, Page: 48
Suisse
grâce et disgrâce
Guerre suisse
La Suisse s’est longtemps étripée pour des questions religieuses. Jusqu’ici, elle ne l’a jamais fait pour des raisons linguistiques. Ce miracle menace de ne pas durer. Une majorité du Conseil national entend obliger les cantons à enseigner prioritairement une autre langue nationale plutôt que l’anglais.
Il est révoltant que l’on en soit arrivé là: obliger les Suisses à s’aimer, à se respecter, à se parler. L’envie de communiquer dans la langue de la majorité alémanique, respectivement des minorités latines, devrait nous être à tous naturelle, consubstantielle. Un plaisir et une fierté. Hélas, c’est devenu une corvée. Même plus un mal nécessaire. Pauvre Suisse!
Le Conseil national se réveille trop tard, et le Conseil des Etats, dûment renseigné par la présidente de la Conférence des chefs de département de l’instruction publique, Isabelle Chassot, ne suivra pas. Ou alors, un référendum sera appelé à trancher cette sale guerre entre Suisses. Ce ne sera pas beau à voir. On se jettera l’héritage à la figure: marre de faire des efforts pour les Romands, marre de subir la suprématie des Alémaniques.
L’erreur dans la question linguistique a été de mettre toute la faute – et les obligations – sur l’école. Ce n’est pas d’hier que nous sortons de l’école sans savoir tenir une conversation avec un Confédéré. Mais qu’avons-nous fait, individuellement, pour y remédier? Rien.
Plutôt que de légiférer à la place des cantons, le Parlement serait mieux inspiré de mettre à disposition des fonds encourageant l’immersion linguistique, volontaire et facultative, à tout âge. Un programme de formation continue au plurilinguisme national. Si l’école ne donne pas le goût de parler aux autres Suisses, pourquoi ne pas accorder des séances de rattrapage pendant l’apprentissage, les études, la vie professionnelle?
L’ancien conseiller fédéral Jean-Pascal Delamuraz racontait qu’il obligeait chaque année ses enfants à découvrir une ville alémanique. Un exemple à imiter. |