Douche trumpienne glaciale pour notre fête nationale suisse. Je pourrais dire que l’unilatéralisme et les coups de force de Trump font apparaître les négociations entre la Suisse et l’Union européenne comme d’aimables échanges entre gentlemen. Mais il y a des jours où on aurait adoré avoir tort, et je ne me réjouis pas des calamités à venir: le franc fort et 39% de taxes douanières, cela va être tellement ravageur pour notre économie d’exportation, que je peine à trouver la leçon intéressante.
Comme la guerre russe en Ukraine, cette guerre commerciale hors du commun déclenchée par les États-Unis * devrait conduire la Suisse à repenser sa position géopolitique et à mettre à jour ses réflexions stratégique. Le Conseil fédéral serait bien inspiré de lancer un vaste débat avec les partis, les milieux économiques ET le monde académique, et les think tanks qui gravitent autour de lancer Genève internationale (il faut noter qu’à cause du même Ubu Roi de la Maison Blanche, les périls sur la Genève internationale sont aussi colossaux).
Jusqu’ici, le monde politique suisse n’a tiré aucun aggiornamento des crises qui se sont succédées. Rien après la crise des fonds en déshérence, rien après la chute brutale du secret bancaire, si peu après la crise financière de 2008, rien après l’agression russe contre l’Ukraine… On ne va pas pouvoir cette fois encore la jouer « business as usual ». Il va falloir oser une réflexion POLITIQUE sur l’avenir de la Suisse.
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C’est le moment de se souvenir que les États-Unis représentent 13% du commerce mondial – et que donc l’OMC pourrait renaître malgré eux.
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A propos des taxes douanières, il faut bien écrire que ce sont les « États-Unis » qui nous les imposent parce que la responsabilité des Republicains et des Démocrates, comme celle des tribunaux ou des milieux d’affaires qui laissent Trump faire n’importe quoi me paraît écrasante. Le check and balance, mon œil… ou plutôt ça a bien endormi le monde cette idée que les excès seraient « naturellement » corrigés.
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En Suisse, depuis une bonne trentaine d’années, une partie de la classe politique a pris pour habitude de détester l’Union européenne ( et son pouvoir de régulation) et de désigner les États-Unis comme alternative. C’est devenu une obsession: ergoter sur la moindre virgule provenant de Bruxelles et se pâmer devant l’eldorado américain sans foi ni loi. Or, nous sommes un pays pour lequel le respect du droit est vital, existentiel: sans le droit, nous ne tenons pas ensemble et nous n’avons pas d’armes sur la scène internationale. Sans le respect du droit, nous n’avons plus de rôle particulier et de mission : défendre le droit humanitaire.
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Je ne suis pas la plus grande fan de Guy Parmelin et de Karin Keller-Sutter. De la naïveté, de l’aveuglement idéologique et une mauvaise gestion du timing, on pourra leur faire des reproches. Mais peut-on vraiment reprocher à notre gouvernement et à l’administration fédérale de croire en la bonne foi de leurs interlocuteurs? J’observe plutôt que, après avoir dû réparer plusieurs fois les pots cassés de nos banques aux États-Unis, le Conseil fédéral doit arranger les affaires de la pharma, alors que traditionnellement l’économie suisse est allergique à toute intervention étatique et toute politique industrielle. N’est-ce pas très naïf de croire que nos ministres choisis pour accompagner les intérêts de Schweiz AG sans trop faire de vagues et sans interférer dans le business peuvent se muer soudain en Machiavel?
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Pour certains en Suisse, tout est toujours «la faute à l’Europe». Du coup, ils prétendent que Trump maltraite notre économie avec ses tarifs démentiels «à la demande des Européens». D’autres inventent des «fonctionnaires euroturbos saboteurs». C’est vraiment tordu de chez tordu.
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Quelle alternative au marché étatsunien? Notre principal partenaire économique est l’Union européenne. Ça tombe bien, le Conseil fédéral vient de stabiliser les relations et assurer l’avenir avec le paquet des bilatérales 3. Les débouchés européens peuvent certainement être développés, nos voisins directs sont traditionnellement prépondérants, mais on peut certainement mieux travailler la Pologne, les états baltes et scandinaves,… tout comme les marchés asiatiques et américains hors États-Unis ( Canada, Brésil,…).Quelle alternative au marché étatsunien? Notre principal partenaire économique est l’Union européenne. Ça tombe bien, le Conseil fédéral vient de stabiliser les relations et assurer l’avenir avec le paquet des bilatérales 3. Les débouchés européens peuvent certainement être développés, nos voisins directs sont traditionnellement prépondérants, mais on peut certainement mieux travailler la Pologne, les états baltes et scandinaves,… tout comme les marchés asiatiques et américains hors États-Unis ( Canada, Brésil,…).
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Selon la conseillère nationale Elisabeth Schneider-Schneiter : « Les accords bilatéraux sont une bonne affaire. La contribution à la cohésion de 350 millions de francs est 160 fois moins chère que les droits de douane de Trump. »
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La différence entre les Européens et les Américains est que les premiers ont tiré les leçons de leur histoire. Les Européens ont renoncé à la guerre et à la brutalité: ils travaillent ensemble, cherchent des compromis, s’appuient sur le droit.
Les États-Unis n’ont rien appris de leurs erreurs passées et se complaisent dans l’idée d’une supériorité morale. La vraie grandeur n’est pourtant pas dans la brutalité des rapports de force, mais dans le respect des partenaires et même des adversaires, et la recherche de solutions communes.
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Après avoir dû réparer plusieurs fois les pots cassés de nos banques aux États-Unis, le Conseil fédéral doit arranger les affaires de la pharma, alors que traditionnellement l’économie suisse est allergique à toute intervention étatique. Et on s’étonne de l’échec face à Trump?
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En six mois, le cataclysme Trump nous aura bousillé l’écosystème de la Genève internationale et nos industries d’exportation. Pour une Suisse qui se croyait « République soeur », le réveil est douloureux!