Les rendez-vous de la rentrée

Heureusement que nous sommes en année d’élections fédérales, sinon la rentrée aurait un goût de déjà vu ! On va comme chaque automne reparler des coûts de la santé. Ils augmentent. Logique, nous vivons plus vieux et la médecine est toujours plus sophistiquée. Ce progrès n’est hélas pas financé uniquement par l’impôt mais par des primes d’assurance-maladie individuelles. *

L’impact des primes sur notre pouvoir d’achat devient insupportable, mais la Berne fédérale se révèle incapable de proposer un système plus juste. Nous restons prisonniers d’une loi votée il y a 25 ans. Comparis a annoncé une hausse de 2 à 3% des primes. Alors cette année encore, on cherchera des coupables plutôt que des solutions.

Il est un autre dossier où nos élus préfèrent se déchirer plutôt qu’avancer, c’est celui de nos relations avec l’Union européenne. Se passera-t-il quelque chose avant le départ de Jean-Claude Juncker de la Commission fin octobre ? Le Conseil fédéral tentera-t-il quelque chose à Bruxelles ? C’est peu probable. C’est sur le front interne qu’il pourrait y avoir du mouvement : syndicats et patrons pourraient se mettre d’accord sur les modalités d’un soutien à l’accord-cadre.

A la mi-juillet, Pierre-Yves Maillard, le nouveau président de l’USS, a scellé un accord avec l’Union patronale sur le deuxième pilier. Cela augure de possibles percées dans le casse-tête de nos relations bilatérales avec l’UE. La Suisse va découvrir l’effet Maillard que les Vaudois connaissent bien. L’ancien conseiller d’Etat aime créer un rapport de forces dur pour faire céder ses adversaires et obtenir des résultats concrets.

S’il s’agit de préserver les salaires, les partenaires sociaux disposent en effet d’une marge de nanoeuvre. Il serait temps qu’ils l’exploitent. Le contexte du Brexit à la sauce Boris Johnson les rendra-t-ils plus lucides sur notre intérêt à engranger le fruit de cinq ans de négociations ?

Cet enjeu européen sera au cœur de la campagne des élections fédérales, même si les partis n’aiment pas l’évoquer en période électorale. Leur silence et leur grand embarras sur cette question cruciale sera bousculé par un nouveau venu sur la scène politique fédérale, Opération libero.

Le mouvement, né en 2014, ambitionne d’avoir 6 à 9 sièges au Conseil national afin d’y promouvoir une Suisse ouverte et progressiste. Il réunit des candidats de différents partis qui ont en commun l’ambition de sortir la Confédération des dogmes blochériens qui la paralysent et la fragilisent. Opération libero réussira-t-il à réconcilier la politique avec la sociologie réelle du pays ?  Réponse le 20 octobre.

Ce dimanche-là, c’est en tout cas une poussée verte qui est attendue. Les sondages la prédisent, mais c’est son ampleur qu’il faudra surveiller. Changer les équilibres aux Chambres fédérales est une tâche herculéenne : la proportionnelle et le découpage fédéraliste atténuent les effets concrets des fièvres de l’électorat. Mais au Conseil national, les majorités sont serrées, quatre ou cinq sièges de plus pour un parti peuvent donc avoir un impact. La gauche rêve d’y renverser la majorité UDC-PLR sortie des urnes en 2015 (et dont le bilan est maigre).

Suivra en décembre la réélection du Conseil fédéral. Tous les ministres se représenteront-ils ? Ueli Maurer, choisi en 2008,  et qui fêtera ses 69 ans le 1er décembre, a déjà vu  deux collègues élus après lui tirer leur révérence (Didier Burkhalter et Johann Schneider-Ammann). Dès la rentrée, les spéculations iront bon train sur le totocalcio fédéral, avec une variante : si les Verts dépassent le PDC faudra-t-il leur donner un siège au Conseil fédéral ? La perspective est explosive !

Un dernier point occupera les journalistes : l’aide à la presse. Nouvelle venue au Département de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication, Simonetta Sommaruga doit faire des propositions pour venir au secours d’un secteur en graves difficultés économiques, totalement chamboulé par le numérique. Osera-t-elle une aide directe aux journaux, utilisera-t-elle l’argent de la redevance perçu en trop, ou celui des concessions 5G ? Les rédactions sont à l’affût, les lecteurs devraient l’être aussi : il en va de leur droit de citoyens à disposer d’une information diversifiée et de qualité.

  • Texte paru en italien dans Il Caffè le 5 août 2019