Cela tient d’abord au mode d’élection: ce n’est pas le peuple qui choisit les conseillers fédéraux (et encore moins les journalistes tous «baba» devant le prodige lémanique), mais les 246 grands électeurs de l’Assemblée fédérale. Ceux-ci sont très jaloux de leur prérogative suprême. En général, ils cooptent l’un d’entre eux (ce qui leur permet de continuer à rêver qu’un jour peut-être leur tour viendra). Parfois, ils rejettent les candidats officiellement désignés par leur groupe parlementaire afin de montrer «qui commande ici». Les Suisses se moquent de l’«entre-soi» des élites parisiennes, mais l’«entre-soi» du Palais fédéral n’est pas triste non plus.

Il arrive toutefois aux parlementaires de porter leurs suffrages sur les meilleurs – ce fut le cas, par exemple, lors de l’élection de Doris Leuthard. Auparavant, les députés avaient beaucoup maltraité son parti, les démocrates-chrétiens, et ce fut une manière de se racheter, d’enterrer la hache de guerre. Oui, il arrive encore aux parlementaires d’être à la hauteur de la lourde responsabilité qui est la leur, mais c’est devenu rare.

Souvent les députés, par accident ou par combine, intronisent un à peine connu (Hans- Rudolf Merz ou Otto Stich, par exemple), un faux dur vrai mou (Johann Schneider- Ammann), des braves types dont on se demandera pendant des années comment ils se sont retrouvés là (genre Joseph Deiss). Ils ont le don d’écarter les femmes brillantes (Christine Beerli, Karin Keller-Sutter).

Plutôt que de confier un septième du pouvoir exécutif à une personnalité énergique qui fera de belles étincelles au sein du collège, les parlementaires ont tendance depuis quelques années à y placer une sympathique souris grise qui ne fera d’ombre à personne, et dont l’aura –inexistant – n’aura aucun impact électoral préjudiciable pour leurs propres partis…

Ainsi s’installe peu à peu le règne de la médiocrité tranquille. En l’absence de sparring partners à leur hauteur, même les bons du Conseil fédéral s’affadissent et plongent dans le train-train quotidien de la gestion courante des dossiers, à peine agité par quelques votations populaires…

Cette manœuvre de dévaluation du politique est si courante qu’on la camoufle derrière une explication mythologique rassurante: les Suisses, qui n’ont jamais eu de roi, n’aimeraient pas les têtes qui dépassent.

Quelle bonne blague: tous les Suisses aiment Federer et sont fiers qu’il soit le meilleur joueur de tennis de tous les temps; tous les Suisses hurlent de joie quand un des joueurs de la Nati hisse sa tête au-dessus de celles de autres et plante un but. Pourquoi devrions-nous être un petit peuple d’imbéciles heureux qui n’aspirent à rien d’autre que le maintien de son confort? Les citoyens ne demandent pas à être fiers

de leurs élus ni à les adorer comme des pop stars, ils souhaiteraient juste disposer au gouvernement de gens compétents et convaincants qui résolvent les problèmes du pays plutôt que de procrastiner d’un air profondément absorbé.

Mais, il y a peut-être une autre explication moins avouable: placer des mous au sein du pouvoir exécutif, cela arrange bien le pouvoir économique (le seul, le vrai qui compte en Suisse) afin que celui-ci puisse mener ses affaires à sa guise sans que l’Etat ne joue excessivement son rôle de régulateur ou de garde-fous.

Les grandes gueules au Conseil fédéral (oui, il y en a eues jusqu’à récemment), ce n’est pas commode, ça tape sur la table. Ainsi le radical Jean-Pascal Delamuraz, en charge du Département de l’Economie, osant dire aux banquiers zurichois qu’ils exagéraient avec leurs hausses des taux hypothécaires, lesquelles étranglaient alors les locataires de tout le pays.

Le pire dans cette tâcheronne course au plus petit dénominateur commun, c’est que l’on vend aux Suisses l’idée que la composition de leur gouvernement tient de la «formule magique». Les fauteuils de ministres sont en effet répartis selon le poids électoral obtenu par les partis lors des dernières élections fédérales: les trois premiers ont droit à 2 sièges, le quatrième à 1.

Cette règle date de 1959, mais elle a mal résisté aux assauts hégémoniques de l’UDC sur la vie politique suisse, et a rendu difficile l’accession des femmes aux plus hautes responsabilités. Car, en plus, la Constitution prescrit que «les diverses régions et les communautés linguistiques doivent être équitablement représentées au Conseil fédéral».

Dès lors, au lieu de s’efforcer de choisir le ou la meilleur-e, les 246 grands électeurs s’écharpent sur des quotas linguistiques ou de genre. Les compétences passent au second plan.

La formule magique ne produit plus rien de magique, mais une salade russe insipide. Pour maintenir une représentation politique équilibrée, et satisfaire les revendications des régions et des femmes, il aurait fallu augmenter le nombre de conseillers fédéraux à 9, comme le demandait le canton du Tessin. Mais là encore, la Berne fédérale refuse obstinément, dans sa majorité, de remettre en question ses habitudes et ses certitudes.

Bon, à ce stade de l’explication, on espère juste avoir tout faux et être invités bientôt à Genève…

Article publié sur le site Bon pour la tête:

https://bonpourlatete.com/actuel/pourquoi-n-e-lit-on-pas-toujours-les-meilleurs-au-conseil-fe-de-ral

Les conséquences du coup de force tessinois

Depuis que Flavio Cotti a quitté le Conseil fédéral en 1999, les Chambres ont eu en théorie 14 occasions d’élire un Tessinois. Elles ne l’ont pas fait pour toutes sortes de raisons, des tordues ou des honorables.

Fort de cette revendication légitime de tout un canton, voire de tous les italophones, le parti-libéral radical tessinois a imposé la candidature unique d’Ignazio Cassis. Ce faisant, il a méprisé l’aspiration des femmes à une représentation plus paritaire au gouvernement.

Dans un pays fédéraliste, ce coup de force est un drôle de signal envoyé aux autres minorités ou sensibilités: notre revendication est prioritaire, taisez-vous punto, basta, finito !

Pourquoi le 20 septembre prochain, cet impératif devrait-il s’imposer au détriment de tout autre ? Pourquoi l’Assemblée fédérale devrait-elle céder sans réfléchir comme un parent cède à un enfant qui crie trop fort?

En proposant les candidatures d’Ignazio Cassis et de Laura Sadis au groupe PLR, la section tessinoise aurait offert à l’Assemblée un choix et permis à celle-ci de résoudre deux problèmes d’un coup.

Cette piètre compréhension de l’intérêt général national a légitimé les prétentions romandes. Dès lors, l’invocation de la clause régionale pour éliminer les concurrents d’Ignazio Cassis sans considération de leurs compétences relève autant de la faiblesse que de l’arrogance.

Le match pour départager Cassis, Moret et Maudet devrait se faire désormais sur leur profil politique et non plus sur leur origine cantonale. Un coup de force ne reste jamais sans conséquence.

Politique fédérale: Un brillant réveil

Le ticket a trois est un premier signe de défiance à l’égard d’Ignazio Cassis. Grâce à sa campagne «sur le fond», Pierre Maudet est parvenu à sortir le groupe des Chambres fédérales de l’entre-soi auto-référentiel.

Bien sûr, fort de la revendication tessinoise de revenir au Conseil fédéral, Ignazio Cassis reste le favori. Le 20 septembre, beaucoup dépendra de l’attitude du PDC et de l’influence d’un autre Tessinois, Filippo Lombardi.

Cette élection est marquée par les intérêts personnels de plusieurs membres des Chambres fédérales qui rêvent de se voir élu au gouvernement selon que la question tessinoise ou celle du genre aura été réglée lors de la succession Burkhalter. Ambitions démesurées et petits calculs politiciens, très éloignés de l’enjeu: se doter de leaders capables de tenir un cap politique plutôt que de gérer les problèmes au jour le jour.

Dès lors, une interrogation: le PLR a-t-il encore l’ambition de redevenir le premier parti du pays, le premier parti à droite? Avec Ignazio Cassis, ce sera pour le PLR «business as usual». L’ancien médecin cantonal a donné trop de signes d’inféodation au lobby de l’assurance-maladie et à l’UDC pour incarner un nouveau souffle.

Avec Isabelle Moret, le parti se rendra sympathique auprès des femmes, mais la Vaudoise, si elle se révélera sans peine meilleure que Guy Parmelin, devra trouver ses marques avec plus de sérénité qu’elle n’en a démontré dans la campagne.

Maudet: l’homme d’Etat

Une évidence s’impose: Pierre Maudet surclasse ses concurrents issus du sérail. Avec lui, on sait déjà ce que l’on a: un homme d’Etat aux compétences reconnues. Le ministre genevois est en charge de la sécurité et de l’économie, les deux secteurs qui préoccupent le plus les gens, et où le PLR se doit de marquer sa différence avec l’UDC. Le capitaine Maudet sait à la fois faire preuve de fermeté et d’ouverture. Il incarne une figure libérale de responsabilité, il est de la lignée des radicaux qui ont marqué notre histoire.

Même sur la question frontalière ou celle du dumping salarial, si importantes pour le Tessin, il a plus d’épaisseur et de créativité politique que Ignazio Cassis.

Au Conseil fédéral, on ne peut plus se permettre de choisir les moins bons du ticket sous prétexte qu’ils ne feront pas d’ombre aux autres partis. Ce minable jeu de marketing politicien est indigne de la responsabilité qui incombe aux grands électeurs de l’Assemblée fédérale.

La logique du plus petit dénominateur commum qui s’est installée depuis quelques années au Palais fédéral plonge lentement la Suisse dans l’inefficacité et la pusillanimité. Choisir Pierre Maudet sonnerait l’heure d’un brillant réveil.

Ignazio Cassis: le candidat italophone qui renie ses origines italiennes

En annonçant qu’il avait rendu son passeport italien, Ignazio Cassis a-t-il commis la gaffe qui le privera du Conseil fédéral ? On ne prendra pas le pari tant le lobby des caisses-maladie qui souhaite le placer au gouvernement est puissant. Mais son attitude jette une lumière crue sur son tempérament.

Voilà un libéral qui revendique le dogme de la responsabilité individuelle et qui cède sans combattre à la moindre pression venant de l’UDC. On attend d’un conseiller fédéral qu’il démontre plus de force de caractère et de résistance lorsqu’il est face à la critique.

Voilà un candidat qui clame que le Conseil fédéral doit se montrer plus courageux, et qui commet une retentissante lâcheté à la première occasion.

Voilà un homme prêt à renier ses origines et sa famille pour servir sa carrière : Ignazio Cassis est né Italien, il s’est fait naturaliser à 15 ans, c’eut été un beau symbole qu’il se revendiqua comme premier conseiller fédéral né étranger.

La question des binationaux n’est pas un petit détail. Elle a pris de l’ampleur depuis la votation sur la naturalisation facilitée de la troisième génération, en février dernier, qui a vu l’UDC mordre la poussière. Depuis cet échec inattendu, le parti nationaliste a clairement décidé d’attaquer les détenteurs de plusieurs passeports. Une lubie ethnique malsaine, qui instille l’idée que certains Suisses le sont plus que d’autres, et qu’un binational ne saurait être vraiment loyal à nos institutions.

Première remarque : si notre pays est le mélange de trois grandes cultures européennes, force est de reconnaître que nous ne descendons pas tous en ligne directe des Waldstaetten ? Nos racines européennes mériteraient d’être mieux considérées. Deuxième remarques : la double-nationalité, reflet de notre histoire migratoire mais aussi de nos histoires d’amour, est beaucoup plus fréquente qu’on ne le croit. Lors d’une discussion sur facebook, le géographe Pierre Dessemontet m’a aimablement fourni les chiffres suivants :

– 854’705 suisses sont doubles-nationaux en Suisse selon des estimations issues du Relevé Structurel (poolé 2011-2015) – auxquels if faut encore ajouter 559’542 suisses double-nationaux résidant à l’étranger (2015). Au total: 1’414’247 binationaux sur 6’855’248 citoyens suisses, ou plus de 20%.

– pour ce qui concerne les cantons, dans l’ordre Zurich en compte 177’504, Vaud 110’830, Genève 96’358, Berne 66’730, le Tessin 59’714, l’Argovie 53’196, Saint-Gall 37’538, le Valais 29’665, Bâle 27’470, Neuchâtel 26’799…

– pour ce qui concerne les nationalités, l’Italie arrive en tête avec 214’093, puis la France 97’089, l’Allemagne 66’389, la Turquie 40’281, la Serbie 35’281, l’Espagne 31’146, le Kosovo 25’753, le Portugal 24’727, la Grande-Bretagne 22’893, la Croatie 21’827, la Bosnie 21’265…

En renonçant à son passeport italien, Ignazio Cassis a raté l’occasion de rendre un formidable hommage aux capacités d’intégration de la Suisse. Ses réponses sur la question des « juges étrangers » montre qu’il préfère les mythes interprétés par l’UDC à la réalité de la Suisse telle qu’elle est. C’est décevant, c’est une faute morale.

Surtout, son attitude pointe toute l’ambiguïté de la relation que le Tessin entretient avec l’Italie. Voilà un canton qui revendique un siège au Conseil fédéral du fait de sa spécificité linguistique et culturelle, mais dont le candidat n’assume pas ses racines italiennes. C’est pour le moins paradoxal. Si on renie son italianité, comment prétendre la défendre au sein du gouvernement ?

Nombre de Tessinois soutiennent la candidature d’un des leurs en argumentant que la présence d’un italophone améliorera les relations avec l’Italie. On peut désormais douter que Rome soit favorablement impressionné par un ministre d’origine italienne qui lui a rendu son passeport avec tant d’ostentation et d’opportunisme.

La Suisse, créée en 1848 par le parti radical, est une nation de volonté, fondée sur le respect des différences et des minorités. Le 20 septembre prochain, l’Assemblée fédérale a pour mission d’élire un PLR digne de cet héritage, pas un troisième UDC.

Publié sur le site de Bon pour la tête le 26 août: 

https://bonpourlatete.com/actuel/ignazio-cassis-1

Double-nationaux, le poison instillé par l’UDC

L’UDC a le don de nous fabriquer des polémiques apparemment vaines mais qui instillent dans la société le poison de la division et de la méfiance.

Dernière en date, la mise en doute de la loyauté d’un potentiel élu au Conseil fédéral qui serait bi-national.

Petit rappel: la double nationalité n’est pas un droit ou un privilège. C’est la conséquence d’une histoire de vie et de famille. Respectons nos racines.

La Suisse est le cœur de trois grandes cultures européennes, il est normal que nous ne descendions pas tous en droite ligne des Waldstaetten.

La Suisse est une nation de volonté, de volonté notamment de respecter les minorités, alors ne commençons pas à trier dans les degrés de suissitude certifiée AOC

Insinuer que certains Suisses sont plus suisses que d’autres, c’est la négation de ce que nous sommes, une insulte à notre histoire commune.

 

Ignazio Cassis: les 1,4 million de Suisses binationaux ne lui disent pas merci

En annonçant qu’il avait rendu son passeport italien, Ignazio Cassis a-t-il commis la gaffe qui le privera du Conseil fédéral? On ne prendra pas le pari tant le lobby des caisses-maladie qui souhaite le placer au gouvernement est puissant. Mais son attitude jette une lumière crue sur son tempérament.

Voilà un libéral qui revendique le dogme de la responsabilité individuelle et qui cède sans combattre à la moindre pression venant de l’UDC. On attend d’un conseiller fédéral qu’il démontre plus de force de caractère et de résistance lorsqu’il est face à la critique.

Voilà un candidat qui clame que le Conseil fédéral doit se montrer plus courageux, et qui commet une retentissante lâcheté à la première occasion.

Voilà un homme prêt à renier ses origines et sa famille pour servir sa carrière: Ignazio Cassis est né Italien, il s’est fait naturaliser à 15 ans, c’eut été un beau symbole qu’il se revendiqua comme premier conseiller fédéral né étranger.

La question des binationaux n’est pas un petit détail. Elle a pris de l’ampleur depuis la votation sur la naturalisation facilitée de la troisième génération, en février dernier, qui a vu l’UDC mordre la poussière. Depuis cet échec inattendu, le parti nationaliste a clairement décidé d’attaquer les détenteurs de plusieurs passeports. Une lubie ethnique malsaine, qui instille l’idée que certains Suisses le sont plus que d’autres et qu’un binational ne saurait être vraiment loyal à nos institutions.

Première remarque: si notre pays est le mélange de trois grandes cultures européennes, force est de reconnaître que nous ne descendons pas tous en ligne directe des Waldstaetten. Nos racines européennes mériteraient d’être mieux considérées.

Deuxième remarque: la double-nationalité, reflet de notre histoire migratoire mais aussi de nos histoires d’amour, est beaucoup plus fréquente qu’on ne le croit. Lors d’une discussion sur facebook, le géographe Pierre Dessemontet m’a aimablement fourni les chiffres suivants:

  • 854 705 Suisses sont doubles-nationaux en Suisse, selon des estimations issues du Relevé Structurel (2011-2015), auxquels il faut encore ajouter 559 542 Suisses double-nationaux résidant à l’étranger (2015). 
    Au total: 1 414 247 binationaux sur 6 855 248 citoyens suisses, soit plus de 20%
    .
  • pour ce qui concerne les cantons, Zurich en compte 177 504, Vaud 110 830Genève
    96 358
    , Berne 66 730, Tessin 59 714, Argovie 53 196, Saint-Gall 37 538, Valais 29 665, Bâle 27 470, Neuchâtel 26 799
  • pour ce qui concerne les nationalités, l’Italie arrive en tête avec  214 093, puis la France 97 089, l’Allemagne 66 389, la Turquie 40 281, la Serbie 35 281, l’Espagne 31 146, le Kosovo 25 753, le Portugal 24 727, la Grande-Bretagne 22 893, la Croatie 21 827, la Bosnie 21 265…

Elire un PLR, pas un troisième UDC

En renonçant à son passeport italien, Ignazio Cassis a raté l’occasion de rendre un formidable hommage aux capacités d’intégration de la Suisse. Ses réponses sur la question des «juges étrangers» montre qu’il préfère les mythes interprétés par l’UDC à la réalité de la Suisse telle qu’elle est. C’est décevant.

Surtout, son attitude pointe toute l’ambiguïté de la relation que le Tessin entretient avec l’Italie. Voilà un canton qui revendique un siège au Conseil fédéral du fait de sa spécificité linguistique et culturelle, mais dont le candidat n’assume pas ses racines italiennes. C’est pour le moins paradoxal. Si on renie son italianité, comment prétendre la défendre au sein du gouvernement?

Nombre de Tessinois soutiennent la candidature d’un des leurs en argumentant que la présence d’un Italophone améliorera les relations avec l’Italie. On peut désormais douter que Rome soit favorablement impressionné par un ministre d’origine italienne qui lui a rendu son passeport avec tant d’ostentation et d’opportunisme.

La Suisse, créée en 1848 par le parti radical, est une nation de volonté, fondée sur le respect des différences et des minorités. Le 20 septembre prochain, l’Assemblée fédérale a pour mission d’élire un PLR digne de cet héritage, pas un troisième UDC.

Article paru sur le site Bon pour la tête:

https://bonpourlatete.com/actuel/ignazio-cassis-1

Presse en crise: la mort de L’Hebdo n’était qu’un prélude

Fusions ou regroupements de rédactions: tous ces gens qui, au moment de la mort de L’Hebdo, ont cru malin de nous enfoncer en expliquant que notre disparition était due à la (mauvaise) qualité de notre travail vont peut-être commencer à comprendre que le problème du financement du travail des rédactions est un tout petit peu plus complexe qu’une ligne éditoriale qui leur donnait des boutons.

Toutes mes pensées émues à mes collègues touchés par ces décisions de part et d’autre de la Sarine, à ceux contraints de partir, à ceux qui restent mais sont bouleversés et inquiets. Hélas, la mort de L’Hebdo n’était qu’un prélude.

Crise de la presse: Les journalistes reprennent leur destin en main

Fusions de titres, regroupements de rédactions, les annonces de restructurations d’envergure dans les médias suisses se succèdent. Les initiatives pour sortir de ce marasme se profilent.

Faire toujours mieux avec moins. Restructurer sans dénaturer. A chaque nouvelle annonce de regroupements des forces et de coupes dans les effectifs, les groupes de presse tentent de convaincre qu’ils prennent les bonnes mesures, même si douloureuses, pour s’assurer un avenir.

Mais, quoi qu’il en soit, et quoi que l’on puisse penser des motivations des grands éditeurs, des journalistes, des graphistes, des illustrateurs, des photographes, trop de ceux qui ont fait métier d’informer avec passion se retrouvent brutalement sur le carreau. Un peu sonnés. Souvent écœurés. Soudain les bras ballants après avoir tant bossé sans compter des années durant pour sauver leur titre, fragilisé par l’érosion des recettes publicitaires.

Les bras ballants?

Enfin non, justement pas.

Les initiatives se multiplient

Lâchés par leurs éditeurs, les journalistes retrouvent leur pleine liberté de parole sur l’exercice de leur métier. Ils ne sont plus les otages de la parole directoriale faussement rassurante sur les perspectives et globalement enfumante sur les chiffres réels. Ils tirent des leçons des débâcles en cours qu’ils s’étaient abstenus de diffuser par loyauté envers leurs employeurs. Ils prennent leur destin en main. Si s’indigner est un réflexe de journaliste, une qualité professionnelle nécessaire, gémir n’est pas le genre de la corporation.

Encore timides et peu connues, mais coordonnées de part et d’autre de la Sarine, les initiatives se multiplient pour rebâtir un paysage médiatique fort et indépendant des grands éditeurs qui abandonnent leur vocation première (on ne parle pas ici de la création de nouvelles aventures éditoriales comme Bon pour la tête, mais d’associations et de comités visant à en favoriser l’éclosion et la pérennité).

Ainsi Médias pour tous (Medien für alle), constitué pour contrer l’initiative No Billag, potentielle torpille des budgets et des ambitions de la SSR, a élargi le périmètre de ses actions à la sauvegarde de la qualité et de la diversité de la presse. Elle souhaite proposer de nouveaux dispositifs d’aide aux médias. En est né, côté romand, le projet Fijou de fonds de financement du journalisme.

Le 7 août se créait à Zurich la Verband Medien mit Zukunft (l’adaptation française est en cours) regroupant 15 médias print ou online parmi lesquels Bon pour la têteRepublikWOZInfosperbersept.infoCulture en jeuSaitentsüri.ch, WePublish,… Cette association veut être la voix de projets éditoriaux indépendants et conteste à Schweizer Medien (Médias Suisses – le lobby des éditeurs) le monopole de la défense des intérêts de la profession notamment au près des autorités politiques.

Chaos créatif

Enfin Media Forti, composé de membres des deux groupes précités et s’appuyant sur les milieux académiques et culturels, entend ouvrir une discussion publique sur les conditions nécessaires à l’exercice d’un journalisme de qualité, au service du débat démocratique, et économiquement viable.

Tout cela vous paraît un peu confus, les missions redondantes? C’est le propre du chaos créatif! Media Forti prépare actuellement deux soirées d’information, l’une à Zurich le 2 octobre, l’autre à Lausanne le 4, pour présenter dans le détail ces initiatives, les faire connaître à l’ensemble de la profession, et recueillir de nouvelles énergies pour les concrétiser.

Car l’enjeu n’est plus de savoir si demain les journalistes publieront le résultat de leurs investigations sur papier ou sur le web, en texte ou en images qui bougent – cette discussion oiseuse qui a nourri d’erratiques stratégies de développement numérique aux retombées peu lucratives jusqu’ici – mais bien de trouver de nouveaux moyens pour financer le travail des rédactions, quels que soient leurs modes d’expression, c’est-à-dire la production d’une plus-value par rapport à l’information brute. Autant que les principaux concernés aient leurs mots à dire, en première ligne.

Article paru sur le site Bon pour la tête:

https://bonpourlatete.com/actuel/les-journalistes-reprennent-leur-destin-en-main

Conseil fédéral: la botte secrète des Tessinois

Piaffant de longue date de retrouver un siège au Conseil fédéral, les Tessinois ne sont pas restés inactifs. En 2011 et 2012, ils ont demandé via des initiatives cantonales à passer de 7 à 9 conseillers fédéraux.

Serpent de mer de la politique fédérale (première votation sur ce sujet en novembre 1900 déjà !), cette proposition est parvenue à retenir l’attention d’une majorité de la Commission des institutions politiques du Conseil national, qui a rédigé une proposition. Comme d’habitude, cette adaptation a été blackboulée en septembre 2016 pat 97 voix contre 88. Bien que la surcharge du Conseil fédéral soit notoire, une majorité craint pour la collégialité, oubliant que celle-ci relève de l’éthique personnelle et pas du nombre…

Lors des discussions, les opposants à une telle réforme (principalement PLR et UDC) ont notamment rassuré les Tessinois en argumentant qu’elle n’était pas nécessaire pour satisfaire leur revendication légitime, des promesses ont été faites, et elles sont suffisamment récentes pour que les députés tessinois les rappelle opportunément à leurs collègues. La députation tessinoise compte bien utiliser cette botte secrète en faveur d’Ignazio Cassis.

Ironie de la campagne actuelle, la Vaudoise Isabelle Moret avait soutenu cette réforme et s’était fortement engagée pour une clarification du texte de la Constitution sur la représentation des régions, qui varie d’une langue à l’autre.

En février 1999, l’abrogation de la « clause cantonale » avait recueilli 74,7% de oui, la preuve que le peuple et les cantons ne sont pas aussi rétifs qu’ont le dit à des réformes dans la manière de choisir les conseillers fédéraux.

A quand une initiative populaire pour le passage à 9 conseillers fédéraux, qui donnerait les moyens à l’Assemblée fédérale de mieux gérer les questions de genre et de représentativité régionale et de se concentrer sur les compétences des candidats?

Pour mémoire, une analyse sur les avantages du passage de 7 à 9:

https://chantaltauxe.ch/tessin-a-quand-un-conseiller-federal/