Islam et société

Quelle place faut-il laisser à l’islam en Suisse, se demande-t-on souvent. La réponse est peut-être très simple : ni plus ni moins que celle qui existe pour les autres religions. Mais cette position de bon sens (défendre nos valeurs et traditions sans discriminer les nouveaux venus) ne va pas de soi. Deux exemples dans l’actualité.

A Volketswil, l’association « al Huda » souhaitait ouvrir une école enfantine. Proche de l’organisation islamiste du Conseil central islamique suisse, elle a indiqué vouloir fonder son enseigement sur le Coran. En deuxième instance, le tribunal administratif zurichois a estimé qu’il est «délicat» de ne pas informer les enfants du fait que «certaines visions religieuses ne correspondent pas aux règles actuelles de la société suisse, en matière d’homosexualité ou de relations sexuelles avant le mariage, notamment». Bonne nouvelle : notre état de droit fonctionne. Quand les revendications des musulmans sont jugées trop communautaristes, elles sont rejetées.

Démarche inverse, visant une meilleure intégration, à l’université de Fribourg, où a été lancé le 1er janvier dernier le Centre Islam et société, rattaché à la Faculté de théologie. But de l’alma mater : développer la recherche, l’enseignement et la formation continue autour de l’islam dans un contexte suisse.

Signe de l’intérêt qu’il suscite, le Centre vient de recevoir un don de 1,43million de francs. La fondation zurichoise Mercator explique dans un communiqué qu’elle « encourage la science et reste persuadée que les échanges interdisciplinaires permettent de fournir des réponses à des questions sociétales actuelles, réfléchir d’une manière scientifique à la position de l’islam dans le contexte helvétique en fait partie». La somme devra permettre la mise sur pied d’un programme doctoral.

Pourtant, l’existence du centre, dirigé par un chercheur en éthique sociale, est contestée par la section cantonale de l’UDC, qui vient d’annoncer qu’elle a recueilli assez de signatures pour une initiative visant son interdiction.

Il est regrettable que l’UDC veuille anéantir une tentative scientifique de mieux appréhender les réalités des musulmans en Suisse. Les autres partis dénoncent l’exploitation électoraliste que l’UDC opère ainsi en année d’élections fédérales.

Ce parti préfère-t-il vraiment que les questions de coexistence avec les valeurs helvétiques soient abordées dans le huis clos des salles de prière par des imams qui ne connaissent pas notre société ?

On ne peut pas déplorer la faible intégration des communautés musulmanes et rejeter a priori des structures qui visent à combler ce fossé. Les autres partis sauront-ils élaborer un contre-discours efficace pour convaincre les citoyens fribourgeois de maintenir le Centre ? Ce sera tout l’enjeu de la votation à venir, qui sera très observée.

* Texte paru en italien le dimanche 26 juillet sur http://www.caffe.ch/