Presse en crise: la mort de L’Hebdo n’était qu’un prélude

Fusions ou regroupements de rédactions: tous ces gens qui, au moment de la mort de L’Hebdo, ont cru malin de nous enfoncer en expliquant que notre disparition était due à la (mauvaise) qualité de notre travail vont peut-être commencer à comprendre que le problème du financement du travail des rédactions est un tout petit peu plus complexe qu’une ligne éditoriale qui leur donnait des boutons.

Toutes mes pensées émues à mes collègues touchés par ces décisions de part et d’autre de la Sarine, à ceux contraints de partir, à ceux qui restent mais sont bouleversés et inquiets. Hélas, la mort de L’Hebdo n’était qu’un prélude.

Les meilleurs au Conseil fédéral ?

Je mets les pieds dans le plat. Les Vaudois n’ont jamais vraiment bien compris pourquoi ni Pascal Broulis ni Pierre-Yves Maillard n’est devenu conseiller fédéral alors qu’il s’agissait, chacun dans son genre, des deux meilleurs de leur génération. L’un a été écarté par le groupe parlementaire PLR, l’autre par l’Assemblée fédérale.

Tout ça pour se retrouver avec Guy Parmelin!!!

D’où ce sentiment de ne pas vraiment se sentir représentés au gouvernement. Je me demande ce que l’on va inventer cette fois-ci pour écarter Pierre Maudet, lui aussi considéré comme un surdoué. On ne peut pas lui reprocher de ne pas savoir l’allemand!!!

J’espère que le groupe PLR choisira un ticket à 3, qui ménage une chance pour Isabelle Moret, meilleure élue romande au Conseil national, comme à Pierre Maudet, meilleur politicien de la génération d’après Broulis et Maillard.

 

 

 

 

 

 

Quand la France redécouvre qu’un président peut faire acte d’autorité…

Tous ces vaincus par Emmanuel Macron, de droite comme de gauche, qui lui donnent des leçons de savoir-faire avec les militaires, c’est un peu pathétique.

Tous ceux qui se lamentent qu’un président fasse acte d’autorité envers les militaires préféraient-ils la mollesse de François Hollande, sa phénoménale indécision, son incapacité à trancher et à assumer?

J’exagère un peu le trait sur Hollande – avec le temps, on s’apercevra qu’il n’a pas été si nul, et que son bilan n’était pas si calamiteux.

Mais, j’ai quand même le sentiment que beaucoup en France redécouvrent ce qu’est un président et la nécessité pour lui d’être quelques fois rugueux. Le fait que cela les stupéfie tant en dit long sur la dévalorisation de la fonction présidentielle depuis Jacques Chirac!

ASIN et UDC: que d’hésitations!

Depuis le temps qu’ASIN et UDC évoquent une nouvelle initiative contre la libre-circulation des personnes, il est cocasse de voir qu’ils n’ont toujours pas tranché entre 3 variantes.

Cette valse hésitation n’est pas digne de leur inflexible « détermination » à agir dans ce qu’ils croient être l’intérêt des Suisses !

Cela conforte l’idée qu’il s’agit plus de gesticulations sur un thème perçu comme porteur au près de l’opinion pour occuper le terrain médiatique que de la recherche de vraies solutions!

Au surplus, ASIN et UDC prétendent à nouveau qu’en cas de vote favorable à leur proposition, « Il n’y aura qu’à aller négocier avec Bruxelles ». L’honnêteté intellectuelle voudrait que ces Messieurs reconnaissent que pour « négocier », il faut que l’autre partenaire soit d’accord. L’expérience du 9 février n’aurait-elle servi à rien?

Macron: un point de vue suisse

Vu de Suisse, le pari de Macron de gouverner au centre avec des majorités à construire à droite et à gauche à l’Assemblée ne paraît pas si fou que cela. Chez nous, cela fonctionne, ça oblige à la discussion, aux concessions réciproques, à une réflexion continue sur le bien commun, plutôt que la défense d’intérêts partisans, ou d’une partie du pays contre l’autre. Mais évidemment, cela oblige la classe politico-médiatique, biberonnée à l’alternance, à revoir tout ses logiciels, à reconsidérer tous ses préjugés, à abandonner toutes ses habitudes…

Je ne dis pas que cela va être facile. La France n’est pas la Suisse, mais il y a un gros potentiel d’efficacité dans le fait de vouloir surmonter les clivages gauche-droite et de chercher des majorités par projets.

L’exemple suisse montre que ce n’est pas toujours facile – ces dernières années l’art du consensus a été très contesté (notamment par l’UDC, et la volonté de certains d’imposer un « Rechtsruck » au Conseil national après les élections fédérales de 2015). Mais d’autres pays fonctionnent avec cette volonté pragmatique d’avancer: l’Allemagne (grande coalition), et l’Italie (chef de gouvernement PD, mais alliance persistante malgré les aléas récents avec l’ex-dauphin de Berlusconi, Alfano). De plus qui veut gouverner dans le cadre européen (dont la France est un pilier, ne l’oublions pas), a intérêt à dépasser les approches trop dogmatiques pour obtenir le soutien des autres pays membres, car les majorités politiques à 27 sont rarement alignées en même temps dans le même camp.

Vu de Suisse, le clivage repli/progrès, fermeture/ouverture qu’incarne le match Le Pen/Macron est bien connu aussi. Il scande notre vie politique depuis 25 ans.

Certains suggèrent que rien ne pourra réussir avant de passer à une VIème République. Je pense qu’avant de passer à une VI ème République, donc de s’embarquer dans une grande discussion institutionnelle, il faut résoudre quelques problèmes concrets des Français, comme le chômage de masse, la fiscalité,… Voyez Renzi qui a magistralement raté sa réforme institutionnelle, faute, notamment d’avoir redonné de l’espoir aux jeunes générations d’Italiens sans emploi, et qui ont assouvi leur frustration légitime en se sont vengeant dans les urnes (quels que soient les mérites de la réforme proposée).

 

Jusqu’où ira le désespoir à la française ?

La présidentielle française ressemble à un missile fou dont plus personne ne semble capable de reprendre le contrôle.  Est-ce que cela peut encore bien se terminer? Qu’est ce que serait une fin satisfaisante?

Macron élu, la Grande Nation s’offrirait un souffle de modernité. Mais les ennuis ne sont-ils pas programmés à l’Assemblée? Quelle majorité pour gouverner? Macron président peut-il pulvériser le clivage gauche droite une seconde fois lors des législatives?

Fillon élu, la France sacrifierait à la logique de l’alternance rituelle, mais le premier ministre devenu président réussira-t-il à se montrer crédible et serein après une campagne aussi boueuse et exaspérée?

Ce qui frappe, c’est que ce grand exercice démocratique est devenu l’expression d’une somme de frustrations et d’envies d’en découdre genre « du passé faisons table rase ». C’est inquiétant.

Il y a une an, les Français se désespéraient de devoir choisir entre Sarkozy, Hollande et Le Pen. Le renoncement de Hollande, les primaires et la marche décidée de Macron ont bien modifié ce casting déprimant. Mais, les Français ne semblent toujours pas soulagés d’avoir un choix somme toute assez élargi.

Prisonniers de leur colère (dont on se gardera de dire qu’elle n’est pas légitime tant la gauche que la droite ont depuis 30 ans failli à leurs engagements) les Français sauront-ils voter utile et efficace pour s’éviter la catastrophe que serait l’élection de Marine Le Pen? Ou voudront ils punir leur classe politique impuissante malgré les conséquences?

Small talks sur la « parole au peuple »

Plutôt que d’invoquer « la parole au peuple » à tout bout de champ, je propose que l’on précise « la parole au débat », c’est à dire à la confrontation des avis.

En démocratie, c’est de la prise en compte de la contradiction que naissent des solutions originales et praticables. Il n’y a pas un seul peuple, il y a des citoyens, des majorités qui varient, et des minorités qui doivent être respectées.

Il faut espérer que les grands débats actuels sur le populisme, nourris par les victoires du Brexit et de Trump, nous permettent bientôt d’avancer vers un peu plus de nuances.

L’utilisation de « La parole au peuple » n’est pertinente que la veille d’une votation ou d’une élection.

L’embarras autour de RASA est très symptomatique

Je dois dire qu’il m’amuse un peu l’embarras autour de RASA, l’initiative qui veut sortir de la Constitution l’article 121 a (accepté de justesse le 9 février 2014).  Je le trouve très symptomatique de la grande frousse que provoque toute prise de position tranchée dans le dossier Suisse-Europe.

Que veulent les initiants? De la clarté. A tort ou à raison, ils pensent que le peuple a été induit en erreur par l’UDC pendant la campagne, et qu’il a cru de bonne foi qu’il pouvait voter pour le contingentement de la main d’oeuvre étrangère et maintenir les accords bilatéraux avec l’Union européenne. Le comité d’initiative RASA (Raus aus dem Sackgasse – Sortons de l’impasse) propose donc de trancher cette ambiguïté. Un oui à son texte signifie la prépondérance des accords bilatéraux et l’attachement à la libre-circulation des personnes. Un non qu’on est prêt à abandonner les accords bilatéraux avec l’UE afin de « reprendre le contrôle de notre politique migratoire. »

D’où vient l’embarras qui étreint le Conseil fédéral (qui oppose à RASA pas moins de deux propositions de contre-projet), de la plupart des partis et des milieux économiques ? RASA demande de la clarté dans un dossier européen où on patauge dans les demi-vérités et les faux-semblants depuis tant d’années que l’on ne s’en rend même plus compte! 

Un exemple: le psychodrame autour de l' »exigence » de Bruxelles de parvenir à un accord institutionnel pour régler le courant normal de nos affaires communes (et de très éventuelles divergences d’interprétation). La Commission nous demande régulièrement et officiellement depuis 2008 de trouver une solution, sans quoi elle ne négociera pas de nouvel accord. 2008, ça fait bientôt dix ans! La Suisse ne peut feindre la surprise, ni jouer l’agacement.

Vous souvient-il que « Klartext » est le nom du journal de l’UDC – SVP? L’exigence de clarté en démocratie devrait aller de soi. Clarté des propositions, clarté des décisions et des perspectives. Ou on veut collaborer avec l’Union européenne ou on ne veut pas.

Il n’est pas sain que le Conseil fédéral passe son temps à se plaindre des « exigences » de Bruxelles qui ne sont que les demandes de nos partenaires afin de poursuivre nos bonnes et fructueuses relations.

Dans notre paysage politique actuel, la proposition implacable de RASA n’est qu’une réponse au pilonnage incessant de l’UDC contre les accords bilatéraux. Elle ambitionne de mettre fin courageusement à ce champ de bataille qu’est notre politique européenne, et dans lequel les forces belligérantes seraient bien en peine d’énoncer clairement leur but de guerre, et les conditions de la paix.

De février 2014 à février 2017

On a fait un bout de chemin en trois ans:

9/2/14: victoire UDC à 50,3% sur l’initiative contre l’immigration de masse.

28/2/16: défaite UDC à 58,9% sur l’initiative de mise en oeuvre.

12/2/17:  défaite UDC sur la naturalisation facilitée et RIE3

D’autres commentaires sur mon fil twitter: https://twitter.com/ChantalTauxe

 

Contre-pouvoir

Avec leurs vérités alternatives, Donald Trump et son équipe font très fort. Les populistes bonimenteurs paraissent devoir triompher partout.
C’est le moment de se souvenir que tous les contre pouvoirs ne s’effondrent pas en même temps. Certes, la presse est fragilisée pour des raisons économiques et technologiques, mais la justice a encore quelques moyens.
J’attends aussi le moment où les propriétaires actionnaires des entreprises de réseaux sociaux se soucieront moins de leurs dividendes que de la certification ou la fiabilité des contenus qu’ils diffusent.
Un commerçant qui se moque de la santé de ses clients n’a guère d’avenir. Non?