Taxes douanières: Les pro-européens ne remercient pas Trump

En plus d’étrangler notre industrie d’exportation, Donald Trump nous jette-t-il dans les bras des Européens ? Cette théorie de vases communicants est apparue depuis quelques jours, pleine de sous-entendus : apeurés par les conséquences des taxes douanières américaines, les Suisses voteraient les yeux fermés sans réfléchir, et alors qu’au fond ils ne le voulaient pas, en faveur du nouveau paquet d’accords bilatéraux 3. Et ce dommage co-latéral ferait l’affaire des pro-européens qui jubileraient de ce coup de pouce inespéré.

En italien, face à ce genre de tartufferie, on dit « se non è vero, è ben trovato », si ce n’est pas vrai, c’est bien inventé.

Non, les pro-européens ne jubilent pas à l’idée que l’économie suisse souffre, ils ne se réjouissent pas non plus des effets domino que risque d’avoir cette nouvelle politique tarifaire unilatérale sur les finances publiques de la Confédération, des Cantons et des Communes.

Les anti-européens helvétiques ont toujours de la peine à le comprendre, mais les pro-européens ne sont pas moins patriotes qu’eux, ils ont simplement un autre point de vue sur l’avenir du pays et la manière d’assurer sa sécurité, sa prospérité et de préserver la démocratie.

Les 39% de taxes douanières américaines et le franc fort auront des effets catastrophiques en Suisse. Et l’on n’ose pas imaginer ce qui se passerait si l’industrie pharmaceutique devait à son tour être frappée de sur-taxes ? Qui pourrait se réjouir d’un tel cataclysme ?

Pour ce qui concerne les bilatérales 3, affirmons haut et fort que ses partisans (dont le Mouvement européen et la plupart des associations faîtières de l’économie à ce stade) n’ont pas besoin de la brutalité trumpienne pour gagner les différentes votations à venir (ratification des accords et contre-initiatives de combat).

Le coup de force trumpien aura peut-être un effet sur les citoyens hésitants, sensibles aux arguments des opposants, agitant notamment et exagérément un impact délétère des accords Suisse-UE sur la démocratie directe. Il faut toutefois rappeler que tous les sondages donnaient des majorités populaires amples pour le paquet négocié, bien avant le chantage mafieux trumpien.

Selon les premières réactions de ses élus, l’UDC est, pour sa part, trop aveuglée par sa détestation systématique de tout ce qui vient de Bruxelles pour changer d’avis. Le premier parti de Suisse reste pour l’heure prisonnier du narratif qu’il a imposé depuis 35 ans « tout sauf un rapprochement avec l’Union Européenne ». Le poids de nos relations avec l’UE – 60% de nos échanges de marchandises en 2024 – ne compte pour rien dans ses réflexions. Tout aussi inopérant aux yeux de nos nationalistes isolationnistes le bon vieux pragmatisme helvétique qui consiste à solidifier nos relations avec nos partenaires historiques vu la tourmente économico-géopolitique qui s’annonce, et à maintenir les chaînes de valeur qui nous lient à nos voisins allemand, italien et français.

Dans ce refus obtus de reconnaître l’Union européenne comme notre allié naturel, tant sur le plan économique que politique, l’UDC ne voit pas que le marché unique européen recèle encore un potentiel de croissance pour les entreprises suisse. Il y a certainement des marchés à développer en Pologne, dans les pays baltes et nordiques, dans la péninsule ibérique et parmi les nouveaux venus au sein des 27. Nos produits sont déjà homologués, euro-compatibles, et il n’y a pas de taxe douanière. Ces facilités du marché unique européen ne sont pas à négliger au moment où des entreprises suisses, notamment des PME, doivent trouver des alternatives à leur débouché étatsunien.

Cette possibilité d’approfondir le potentiel du marché européen n’empêche pas de poursuivre la politique de diversification des débouchés commerciaux, que la Suisse a soignée depuis les années 1990, grâce au cadre offert par l’Organisation mondiale du commerce.

Ce qui n’est plus audible, sauf à vouloir que la Suisse ne soit plus une nation exportatrice, c’est de prétendre que le marché européen peut être remplacé par le marché américain, le chinois ou l’indien. Il nous faut les uns et les autres, idéalement, et sous réserve de nouveaux développements géopolitiques majeurs et nuisibles (telle l’invasion de Taïwan par la Chine). Mais compte tenu de la proximité géographique et des ordres de grandeur de ces différents marchés, l’idée que l’on peut se couper des Européens sans nuire gravement à la prospérité nationale est aussi folle qu’irresponsable. 

Taxes douanières de Trump: quelques réflexions

Douche trumpienne glaciale pour notre fête nationale suisse. Je pourrais dire que l’unilatéralisme et les coups de force de Trump font apparaître les négociations entre la Suisse et l’Union européenne comme d’aimables échanges entre gentlemen. Mais il y a des jours où on aurait adoré avoir tort, et je ne me réjouis pas des calamités à venir: le franc fort et 39% de taxes douanières, cela va être tellement ravageur pour notre économie d’exportation, que je peine à trouver la leçon intéressante.

Comme la guerre russe en Ukraine, cette guerre commerciale hors du commun déclenchée par les États-Unis * devrait conduire la Suisse à repenser sa position géopolitique et à mettre à jour ses réflexions stratégique. Le Conseil fédéral serait bien inspiré de lancer un vaste débat avec les partis, les milieux économiques ET le monde académique, et les think tanks qui gravitent autour de lancer Genève internationale (il faut noter qu’à cause du même Ubu Roi de la Maison Blanche, les périls sur la Genève internationale sont aussi colossaux).

Jusqu’ici, le monde politique suisse n’a tiré aucun aggiornamento des crises qui se sont succédées. Rien après la crise des fonds en déshérence, rien après la chute brutale du secret bancaire, si peu après la crise financière de 2008, rien après l’agression russe contre l’Ukraine… On ne va pas pouvoir cette fois encore la jouer « business as usual ». Il va falloir oser une réflexion POLITIQUE sur l’avenir de la Suisse.

***

C’est le moment de se souvenir que les États-Unis représentent 13% du commerce mondial – et que donc l’OMC pourrait renaître malgré eux.

***

A propos des taxes douanières, il faut bien écrire que ce sont les « États-Unis » qui nous les imposent parce que la responsabilité des Republicains et des Démocrates, comme celle des tribunaux ou des milieux d’affaires qui laissent Trump faire n’importe quoi me paraît écrasante. Le check and balance, mon œil… ou plutôt ça a bien endormi le monde cette idée que les excès seraient « naturellement » corrigés.

***

En Suisse, depuis une bonne trentaine d’années, une partie de la classe politique a pris pour habitude de détester l’Union européenne ( et son pouvoir de régulation) et de désigner les États-Unis comme alternative. C’est devenu une obsession: ergoter sur la moindre virgule provenant de Bruxelles et se pâmer devant l’eldorado américain sans foi ni loi. Or, nous sommes un pays pour lequel le respect du droit est vital, existentiel: sans le droit, nous ne tenons pas ensemble et nous n’avons pas d’armes sur la scène internationale. Sans le respect du droit, nous n’avons plus de rôle particulier et de mission : défendre le droit humanitaire.

***

Je ne suis pas la plus grande fan de Guy Parmelin et de Karin Keller-Sutter. De la naïveté, de l’aveuglement idéologique et une mauvaise gestion du timing, on pourra leur faire des reproches. Mais peut-on vraiment reprocher à notre gouvernement et à l’administration fédérale de croire en la bonne foi de leurs interlocuteurs? J’observe plutôt que, après avoir dû réparer plusieurs fois les pots cassés de nos banques aux États-Unis, le Conseil fédéral doit arranger les affaires de la pharma, alors que traditionnellement l’économie suisse est allergique à toute intervention étatique et toute politique industrielle. N’est-ce pas très naïf de croire que nos ministres choisis pour accompagner les intérêts de Schweiz AG sans trop faire de vagues et sans interférer dans le business peuvent se muer soudain en Machiavel?

***

Pour certains en Suisse, tout est toujours «la faute à l’Europe». Du coup, ils prétendent que Trump maltraite notre économie avec ses tarifs démentiels «à la demande des Européens». D’autres inventent des «fonctionnaires euroturbos saboteurs». C’est vraiment tordu de chez tordu.

***

Quelle alternative au marché étatsunien? Notre principal partenaire économique est l’Union européenne. Ça tombe bien, le Conseil fédéral vient de stabiliser les relations et assurer l’avenir avec le paquet des bilatérales 3. Les débouchés européens peuvent certainement être développés, nos voisins directs sont traditionnellement prépondérants, mais on peut certainement mieux travailler la Pologne, les états baltes et scandinaves,… tout comme les marchés asiatiques et américains hors États-Unis ( Canada, Brésil,…).Quelle alternative au marché étatsunien? Notre principal partenaire économique est l’Union européenne. Ça tombe bien, le Conseil fédéral vient de stabiliser les relations et assurer l’avenir avec le paquet des bilatérales 3. Les débouchés européens peuvent certainement être développés, nos voisins directs sont traditionnellement prépondérants, mais on peut certainement mieux travailler la Pologne, les états baltes et scandinaves,… tout comme les marchés asiatiques et américains hors États-Unis ( Canada, Brésil,…).

***

Selon la conseillère nationale Elisabeth Schneider-Schneiter : « Les accords bilatéraux sont une bonne affaire. La contribution à la cohésion de 350 millions de francs est 160 fois moins chère que les droits de douane de Trump. »

***

La différence entre les Européens et les Américains est que les premiers ont tiré les leçons de leur histoire. Les Européens ont renoncé à la guerre et à la brutalité: ils travaillent ensemble, cherchent des compromis, s’appuient sur le droit.
Les États-Unis n’ont rien appris de leurs erreurs passées et se complaisent dans l’idée d’une supériorité morale. La vraie grandeur n’est pourtant pas dans la brutalité des rapports de force, mais dans le respect des partenaires et même des adversaires, et la recherche de solutions communes.

***

Après avoir dû réparer plusieurs fois les pots cassés de nos banques aux États-Unis, le Conseil fédéral doit arranger les affaires de la pharma, alors que traditionnellement l’économie suisse est allergique à toute intervention étatique. Et on s’étonne de l’échec face à Trump?

***

En six mois, le cataclysme Trump nous aura bousillé l’écosystème de la Genève internationale et nos industries d’exportation. Pour une Suisse qui se croyait « République soeur », le réveil est douloureux!

La Suisse et ses voisins européens, une perspective historique de longue durée

Discours du 1er août 2025 pour la commune de Tannay

Madame la syndique,

Mesdames et Messieurs les représentants des autorités,

Mesdames et Messieurs,

Chères Confédérées et chers Confédérés,

C’est un plaisir et un honneur pour moi d’avoir été conviée à partager cette fête nationale avec vous toutes et tous.

Il m’a été demandé d’évoquer la Suisse et ses voisins européens. Je vais le faire dans une perspective historique, puisque ce soir ce sont notre démocratie, nos libertés et nos valeurs que nous célébrons, mais aussi notre histoire.

Notre pays se situe au cœur de l’Europe, géographiquement. Mais souvent, il est décrit ou présenté comme échappant à l’histoire du continent, un peu à part entre ses somptueuses montagnes. Modestement, je souhaite vous apporter un autre point de vue.

Commençons d’abord par le début : en 1291 nos contrées romandes, et la plupart des territoires actuels de la Suisse, ne sont pas compris dans l’embryon de Confédération qui se forme au Grütli sur les rives du lac des Quatre-Cantons.

Le point commun entre tous nos territoires, c’est l’appartenance au Saint-Empire romain germanique, qui est composé des liens assez hétérogènes que les différents suzerains de l’époque entretiennent avec l’Empereur. Cet empire très informel traverse l’histoire du contient européen de sa création en 962 à sa dissolution en 1806. Les Confédérés s’en sont peu à peu détachés tout en tombant dans l’orbite française.

Le mythe de la naissance de la Confédération en août 1291 s’est construit peu à peu, et surtout au 19ième siècle : la Confédération veut elle aussi sa fête nationale, à l’instar des Français qui ont leur 14 juillet. On fête donc le 600ième anniversaire de la Confédération en 1891. Le succès est au rendez-vous : les festivités du 1er août deviennent une tradition.

Il faut dire que la symbolique des 3 Suisses est puissante – linguistiquement, culturellement notre pays agglomère 3 grandes cultures européennes, la française, l’allemande et l’italienne. Même si nous sommes bien d’accord qu’au début il ne s’agit pas de fonder un état indépendant, mais d’un simple pacte entre paysans de Suisse centrale qui souhaitent s’entraider, se montrer solidaires en cas de coups durs, et se donner des règles pour gérer leurs éventuelles divergences.

Au fil des siècles va se tisser un réseau d’alliances entre les régions rurales et les villes, entre cantons, une alliance de Confédérés, jusqu’à déboucher sur la naissance de l’Etat fédéral de 1848, dans les frontières que nous connaissons actuellement.

Si on consulte les livres d’histoire, on voit que très vite les historiens ne sont pas très à l’aise avec nos origines mythologiques, et apportent toutes sortes de nuances. Mais le mythe des 3 Suisses, de même que les exploits de Guillaume Tell, sont tellement populaires, que l’absence de sources fiables ou même les incohérences dans l’enchaînement des événements présumés ne comptent pas pour une majorité de l’opinion.

Pour faire tenir ensemble 4 langues nationales, 26 cantons et demi-cantons, des religions aussi antagonistes qu’ont pu l’être dans les siècles qui suivirent la Réforme les catholiques et les protestants, des villes, des campagnes et des régions de montagne, toutes nos minorités et nos majorités à géométrie très variable, admettons qu’il faut un récit un peu merveilleux.

Quoi qu’il en soit, en cette soirée du 1er août, j’aimerais sur la base de quelques exemples souligner à quel point notre histoire suisse est reliée à l’histoire du continent.

Parlons d’abord de notre prospérité. Avec ses cols dans les Alpes et le Jura, le territoire suisse est depuis toujours au centre des voies de communication entre le Sud et le Nord de l’Europe. Avant que les marchandises n’arrivent par train, camion ou avion, elles circulent le long des routes, développées à l’origine par les Romains, et par nos fleuves, rivières et lacs.

Le transbordement des marchandises est un vrai business, il nécessite que les attelages s’arrêtent à certaines étapes. Les péages rapportent ainsi beaucoup d’argent. Nos premières sources de richesse viennent de ce commerce. Ce n’est pas un hasard si les cantons qui se liguent au tournant du 13ième siècle sont à proximité du col du Gothard, qui permet aux commerçants italiens d’acheminer leur marchandise vers les principautés et les villes du Saint-Empire romain germanique.

Notre prospérité vient des échanges et du commerce, hier comme aujourd’hui. La Suisse n’a jamais vécu en autarcie.

Une autre source de richesse très spécifique à la Suisse va être le commerce de mercenaires. Par Machiavel, on sait que les soldats confédérés étaient réputés féroces et vaillants. Ils ne redoutaient pas de monter en première ligne.

Jusqu’à la défaite de Marignan en 1515, cette férocité est principalement mise en œuvre par les Confédérés qui souhaitent étendre leur territoire. La défaite calme leurs ardeurs. Les Confédérés sont battus par le roi de France François 1er, et le renfort de troupes vénitiennes.

Ce qui est moins connu, c’est que à peine une année plus tard, les Confédérés signent avec le même François 1er une « paix perpétuelle », en 1516 donc. Parmi les arrangements prévus, François 1er promet de protéger les Confédérés s’ils devaient être attaqués, mais la principale clause est la mise à disposition de troupes pour le Roi de France. C’est ainsi que des régiments de Suisses participeront aux nombreuses guerres européennes de l’Ancien Régime et de l’époque napoléonienne. Cette alliance est renouvelée à l’avènement de chaque nouveau monarque.

Le Roi de France n’a pas l’exclusivité du recrutement, d’autres royaumes, notamment protestants (comme les Provinces-Unies ou Pays-Bas), sollicitent des troupes des cantons suisses. Au point que la diète fédérale devra donner des consignes pour que sur les champs de bataille des Suisses engagés par des belligérants différents ne s’entre-tuent pas.   

On estime qu’un million de Suisses ont servi le Roi de France et que 2 millions de soldats provenant des différents cantons ont été enrôlés dans ce que l’on nommait le service étranger.  

Ce système a pris fin au 19 siècle seulement. C’est une histoire assez tragique – les Suisses se sont faits massacrer aux Tuileries à Paris en 1792 pour défendre la famille royale, le monument du lion de Lucerne a été érigé en leur souvenir – mais ce fut aussi une histoire très lucrative. Ce que les historiens appellent le « prix du sang ».  Les pensions servies aux régiments revenaient enrichir les cantons d’origine.

Savez-vous pourquoi « Boire en Suisse «  signifie boire tout seul dans son coin ? Les soldats suisses au service du Roi de France étaient mieux payés que les autres, ce qui créait des tensions. Alors pour éviter les bagarres, ils disposaient de leurs propres tavernes.

Vous connaissez certainement l’expression  « point d’argent, point de Suisse ». On la trouve dans Les plaideurs de Racine : elle signifie « sans les payer exactement, on ne peut s’assurer les services de mercenaires suisses », donc « on n’a rien pour rien ».

Les caisses royales peinaient parfois à honorer les contrats, et à payer les soldats suisses. Patientes, les familles patriciennes qui levaient des troupes renégociaient habilement et finissaient par se faire payer. Leçon à en tirer, quand les puissants n’honorent pas leur promesse, il faut savoir faire le gros dos !

Au 17 et 18 ième siècle, les Suisses émigraient aussi beaucoup pour trouver du travail. Le mot « suisse » a ainsi été utilisé pour désigner, par exemple, en France un portier d’hôtel particulier ou un employé chargé de la garde d’une église et en Allemagne un laitier, comme nous le rappelle le Dictionnaire historique suisse, consultable en ligne.

De fait, longtemps les immigrés, c’étaient nous, nos ancêtres. Qu’ils aient été mercenaires ou domestiques, les Suisses ont tissé des liens forts avec les pays voisins. Puis notre pays est devenu peu à peu une terre d’immigration. Les flux se croisent après la naissance de la Suisse moderne, de l’Etat fédéral, en 1848.

La Confédération crée son marché intérieur, elle abolit les péages et se dote d’infrastructures. Pour creuser ses tunnels et faire tourner ses usines, elle a besoin de main d’œuvre. Elle va naturellement la chercher dans les pays limitrophes.  Rappelons aussi que notre pays a souvent été une terre d’accueil pour les réfugiés et les persécutés.

Nos histoires familiales témoignent de ce melting-pot, de ce grand mélange au fil des siècles. Dans le canton de Vaud, nous sommes nombreux à avoir des origines huguenotes du nom des protestants chassés du Royaume de France par la Révocation de l’Edit de Nantes.

Nous sommes tout aussi nombreux à avoir des amis ou des conjoints italiens, français, allemands, espagnols, portugais, et des pays des Balkans. Quand ce ne sont pas les statistiques démographiques qui le disent, 27% de la population suisse est étrangère, 34 % en moyenne dans le canton de Vaud, une cérémonie de promotion scolaire et l’énumération des patronymes des élèves nous rappelle cette réalité, et notre incroyable faculté d’intégration.

Grâce à ce grand mélange, au 20ième siècle, la Suisse est devenue une puissance exportatrice, ce qui est une vraie prouesse pour un pays qui n’est pas doté de matières premières. Nous devons être fiers de cette réussite mais aussi conscients de nos interdépendances avec nos voisins et de la nécessité d’entretenir avec eux de bonnes relations, dans un climat de confiance et de respect.

Or il se trouve que nos voisins directs, et de longue date nos principaux partenaires commerciaux, l’Allemagne, la France et l’Italie, ont choisi de se regrouper au sein de l’Union européenne, et notamment de décider ensemble quels accords commerciaux ils passent avec les autres pays.

Dans l’appréciation que nous serons amenés à porter sur la mise à jour de accords bilatéraux que le Conseil fédéral a négocié avec Bruxelles, n’oublions pas notre histoire et les origines et conditions de notre prospérité : l’esprit d’ouverture aux autres, l’audace d’entreprendre et de dépasser les frontières, physiques ou mentales, et une bonne dose de pragmatisme lorsque les circonstances sont compliquées.

Nos aïeux ont eu ce courage et cette humilité. Ils ont su, comme le souhaitaient les premiers Confédérés de 1291, faire face à « la malice des temps ».

Au gré de leurs alliances, les Confédérés ont inventé une manière de vivre pacifiquement, de s’entraider, de négocier entre eux dans le respect des différences et des minorités plutôt que de recourir à la force.  Ils se sont dotés d’institutions basées sur le droit. Ce cheminement des Confédérés au fil des siècles ne diffère de la construction européenne que par le rythme.

Pour conclure, je vous remercie une fois encore pour l’invitation, et pour votre attention. J’espère vous avoir sensibilisé à la richesse de notre histoire, et aux valeurs qu’elle recèle pour nous inspirer et nous guider dans notre époque si chaotique.

Bonne fête nationale.

Vive la Suisse, et vive la démocratie suisse.