La section vaudoise du NOMES, un terreau fertile

Commémorera-t-on l’an prochain le centenaire du vote d’adhésion de la Suisse à la Société des Nations (SDN), le 16 mai 1920? Le scrutin est fondateur, il permet de comprendre pourquoi la Suisse romande livre des résultats plus favorables à l’intégration européenne. Dans ce premier après-guerre mondiale, perçue alors comme la «der des ders», on s’enthousiasme pour le projet de paix universelle, articulé en quatorze points par le président américain Wilson. Les cantons romands plébiscitent l’adhésion à la SDN: 76% de oui en Valais, 76,7% dans le canton de Fribourg, 83% pour Genève, 84,8% pour Neuchâtel et même 93,2% dans le canton de Vaud! Sur le plan national, l’acceptation est plus mesurée à 56,3%. Le Tessin, Berne et les Grisons jouent un rôle décisif.*

En concurrence avec Bruxelles, Genève obtient le siège de la nouvelle organisation internationale, grâce aux bonnes relations personnelles entre le président Wilson et Gustave Ador, président du Comité international de la Croix-Rouge et conseiller fédéral. L’ancrage multilatéral de la Suisse, malgré sa neutralité, et malgré les vicissitudes que connaîtra ensuite la SDN, vient de là, tout comme la vocation de havre diplomatique de l’arc lémanique.

D’autres facteurs expliquent bien sûr les votes plus «ouverts sur le monde» des Romand·es: la tradition protestante, le souvenir du refuge, la francophilie, l’influence de certains conseillers fédéraux, une attitude décomplexée de minoritaire face au pouvoir.

Pour le canton de Vaud, mentionnons la présence à Lausanne de la Fondation Jean Monnet pour l’Europe, depuis 1978, qui promeut les valeurs de l’intégration européenne, indépendamment des échéances de la politique extérieure de la Suisse.

Sur la longue durée, le terreau romand, et vaudois en particulier, reste ainsi fertile pour les pro-européen·nes. A cet égard, on peut estimer que les sondages sont un trompe-l’œil: focalisés sur la question des bilatérales, ils font de l’adhésion à l’Union européenne (UE) une option en soi qui exclurait le ralliement à l’accord institutionnel. Gageons que si celui-ci devait capoter, et que de facto l’adhésion redevienne la seule alternative au repli nationaliste prôné par l’UDC, la flamme des Romand·es pour l’adhésion, endormie par le feuilleton des bilatérales, ressurgirait rapidement.

C’est consciente de cette histoire longue qu’œuvre la section vaudoise du Nomes. Elle privilégie un travail de sensibilisation en réseau. Elle organise quatre à six fois par année des déjeuners, lors desquels des personnalités vaudoises ou suisses sont interpellées sur leurs convictions européennes et/ou leurs connaissances d’une thématique liée à l’UE.

Les quelque 300 membres de la section sont naturellement conviés à ces rencontres, également ouvertes aux non-membres. Une collaboration s’est instaurée avec la Fondation Jean Monnet qui diffuse l’invitation à son propre réseau. Parmi les récent·es oratrices et orateurs, citons la rectrice de l’Université de Lausanne Nouria Hernandez, le professeur Etienne Piguet, spécialiste des migrations, ou Christophe Reymond, directeur du Centre patronal. Enfin, une fois l’an, le Nomes Vaud organise un forum qui offre l’occasion aux militant·es d’approfondir un thème complexe, de se forger des arguments afin de prendre part au débat public avec force.

Ce printemps, deux experts du populisme ont analysé le phénomène qui aura marqué l’année électorale, tant au niveau européen que national.

*Article paru dans le magazine europa.ch 2/2019