On ne dira pas que c’est la « mère de toutes les batailles ». Dans le champ politique suisse, l’expression est trop souvent utilisée. Mais, Prévoyance 2020 est un des dossiers-clé de la décennie. L’avenir des retraites se place régulièrement en tête des préoccupations des Suisses, qui ont le furieux sentiment que les promesses de lendemains radieux et sereins ne seront pas tenues.
Deux conseillers fédéraux radicaux, Pascal Couchepin et Didier Burkhalter, ont tenté de réformer notre système de retraites, sans succès. Le parlement a voulu ensuite placer au gouvernement et à la tête du Département de l’intérieur Alain Berset, un socialiste réputé habile, plus droite-compatible que d’autres prétendants au Conseil fédéral. Le Fribourgeois a élaboré une réforme équilibrée, et le reste du gouvernement, autant que l’on sache, l’a soutenu.
Depuis, les deux chambres se déchirent. Le nouvel équilibre des forces post-élections fédérales au Conseil national a poussé la droite UDC et libérale-radicale à l’intransigeance. Depuis le flop de RIEIII, le mois dernier, on sait où mène ce genre d’entêtement.
Nous en sommes donc à la conférence de conciliation et au vote final. Une solution de compromis est sur la table. Un compromis est par nature imparfait, mais a le mérite de permettre d’aller de l’avant, d’engranger les aspects les moins contestés de la réforme. Si ce compromis n’est pas validé par les Chambres, alors il faudra recommencer la réforme à zéro.
Dans cet exercice, la gauche a concédé le relèvement de l’âge de la retraite à 65 ans pour les femmes – un sacré boa à avaler. La droite UDC-libérale-radicale devrait en prendre la mesure.
En fait, à ce stade, le parlement s’étant révélé incapable de s’entendre (autrement qu’en séance de conciliation), nos institutions suggèrent qu’il serait opportun de faire trancher le dilemme par le peuple.
La responsabilité sera ainsi mieux partagée en cas d’échec populaire. En cas de succès, rien n’empêchera le Conseil fédéral et les Chambres de remettre l’ouvrage sur le métier pour améliorer la durabilité, l’équilibre et le financement de notre système de retraite.
Si Prévoyance 2020 est engloutie corps et bien en vote final, alors vraiment, il faudra douter du sens des responsabilités dans la durée de ceux qui ont choisi Alain Berset.