Langues nationales: Parlons nous. Mieux!

Ravie d’avoir eu tort d’être pessimiste. Voici néanmoins ma chronique parue ce matin en italien dans Il Caffè. J’y fais quelques propositions pour enterrer la guerre des langues.

Y-aura-t-il ce dimanche 8 mars un nouveau coup de canif dans la paix confédérale ? Les citoyens de Nidwald se prononcent sur l’enseignement du français au niveau primaire, et il est à craindre que comme d’autres cantons alémaniques, ils cèdent à la facilité. Trop compliqué, trop lourd, à apprendre le français ? Tant pis.

Vu de Suisse romande, ce refus de la difficulté, cette volonté obtuse de ne pas vouloir trop contraindre les élèves fait sourire quand elle ne fait pas grincer des dents : depuis quand les Alémaniques reculent-ils devant l’effort ? N’incarnent-ils pas traditionnellement l’opiniâtreté, le sérieux, la discipline ? Faut-il revoir les clichés ? Les paresseux, ce ne seraient pas les Latins, mais eux ?

J’imagine que vue du Tessin, cette guerre des langues entre Romands et Alémaniques fait encore plus sourire, ou déclenche même un brin d’agacement. En matière de maîtrise des langues, le Tessin est en effet exemplaire. Il ne fait pas de chichi comme les Romands qui rechignent à parler l’allemand sous prétexte qu’on leur répond en dialecte, et il pratique le français sans se plaindre de sa préciosité.

Si la Confédération n’y met pas bonne ordre (ce qu’elle menace d’entreprendre, tout en reculant le moment de son intervention, comme l’a encore rappelé Alain Berset cette semaine), Romands et Alémaniques vont continuer à se jeter la vaisselle confédérale à la tête, et à s’accabler de reproches.

Il y aurait une manière élégante de sortir de cette crise très délétère pour la cohésion nationale. Ce serait de lancer un vaste programme de formation qui envoie les jeunes Suisses de 20 ans dans les autres régions linguistiques pour initier les écoliers à leur langue. Après le service militaire, vive le service linguistique obligatoire. Le plan devrait aussi favoriser la formation continue et les échanges linguistiques dans le monde professionnel, les entreprises pourraient se jumeler et s’échanger quelques semaines par an des collaborateurs.

Enfin le service public télévisuel, notre chère SSR, devrait développer les programmes traduits. Fastidieux ? Mais non, nos trois cultures (quatre même avec le romanche) sont notre richesse et notre identité.

Pour les Suisses, l’apprentissage des autres langues nationales constitue un devoir de fidélité les uns envers les autres. Il est temps de l’ériger en priorité et de changer de techniques pour obtenir des résultats. Sinon, la Suisse se délitera inexorablement – le processus a déjà commencé à Berne où de moins en moins de parlementaires alémaniques font l’effort d’essayer de comprendre leurs collègues latins.