Les individualistes et le service public

Une société individualistes, poussée dans ses extrêmes, est aussi une société d’égoïstes.

Je me demande qui a vraiment envie de vivre dans une société où « crève à côté de moi, ça m’est égal ». Je ne crois pas que la majorité des gens est cynique. C’est mon côté « franciscain ».

Donc, je crois que la notion de service public, tellement attaquée (comme on le voit dans la campagne NoBillag), va connaître un certain « revival ».  Le service public procède du bien commun, et même si cela paraît totalement utopique, je pense qu’il va redevenir à la mode notamment à cause du vieillissement de la population et des impératifs écologiques.

Il va falloir gentiment expliquer que toujours moins d’impôts signifie moins de bien commun, c’est-à-dire moins de prises en charges solidaires des personnes âgées, des malades, des chômeurs, du changement climatique, des défis de la formation à l’ère digitale, des besoins de sécurité …  Qui croit que l’on peut régler ces problèmes seul individuellement dans son petit coin, son petit cocon?

Après la deuxième guerre mondiale, il a fallu reconstruire une Europe exsangue. Cela a donné les 30 Glorieuses accompagnées d’une fiscalité assez lourde qui a été contestée par Reagan et Thatcher. Depuis, on baisse les impôts à tout va, et globalement dans le monde occidental, les inégalités ont augmenté. On nous fait croire que cela est dû à la globalisation (donc aux pays du Sud qui accèdent au même niveau de vie que nous), mais c’est une belle intox.  Une fiscalité plus importante permettrait de mieux redistribuer les richesses et d’irriguer l’entier de la société.

Bien sûr, les services publics doivent être gérés avec la plus grande efficience, et se garder de tout clientélisme. Mais il est un peu court de considérer que les services publics ne sont pas que des planques pour fonctionnaires fainéants ou profiteurs: ils constituent le bien commun que des citoyens décident de s’offrir pour « faire société » ensemble, et donner à chacun – et pas seulement à quelques uns – la possibilité de s’épanouir individuellement.

 

 

 

 

Dix ans après, les jongleurs financiers enfin attrapés?

Due à des spéculations plus qu’hasardeuses, à des montages financiers aussi incompréhensibles qu’invérifiables, tous pratiqués par des individus et des officines sans scrupules mais obsédés par l’optimisation de leurs « gains », la crise économique de 2007-2008 a contraint les états à s’endetter outrageusement pour sauver leurs banques « too big to fail » et aider des secteurs économiques déstabilisés par l’onde de choc.

La pression sur les mécanismes d’évasion fiscale s’est donc logiquement intensifiée. Il est vrai que les pertes fiscales sont elles aussi abyssales: 350 milliards d’euros de pertes fiscales (dont 120 pour l’UE, selon Gabriel Zucman, économiste français et professeur à l’université de Berkeley, cité par Le Monde  http://www.lemonde.fr/paradise-papers/article/2017/11/05/les-paradise-papers-nouvelles-revelations-sur-les-milliards-caches-de-l-evasion-fiscale_5210518_5209585.html)

On ne sait pas qui exactement renseigne le consortium des journalistes d’investigation, mais les révélations se succèdent, après les swissleaks, les panamapapers, voici les paradisepapers.

Les législateurs sont sommés d’agir contre ces mécanismes, certes légaux, mais chaque jour un peu plus immoraux au vu des conséquences sur les budgets publics et les mécanismes de redistribution qui profitent à l’ensemble des citoyens-contribuables (qui, eux, ont peu de possibilités de s’adonner à l’exil fiscal).

La fable de l’arroseur arrosé, finalement, dix ans plus tard? On se gardera d’être trop péremptoire, mais un peu plus d’équité devant l’impôt ne fera pas de mal.