Ecopop: rebelote?

Le 9 février dernier, 1’463’854 Suisses ont accepté l’initiative « Contre l’immigration de masse ». Que feront-ils le 30 novembre prochain ? La question donne des sueurs froides au Conseil fédéral, aux partis, à économiesuisse.

Le sentiment que la croissance n’est pas maîtrisée s’est déjà exprimé lors des votations sur les résidences secondaires en 2012 et sur l’aménagement du territoire en 2013. La loi défendue par Doris Leuthard était d’ailleurs un contre-projet indirect à l’initiative qui voulait geler les surfaces à bâtir pour 20 ans.

La conviction que la « surpopulation étrangère » alimente cette croissance non maîtrisée est légèrement majoritaire dans la population (50,3 %), comme on l’a vu en février.

Dès lors ceux qui ont voté oui en début d’année ont-ils des raisons de rejeter Ecopop, qui souhaite limiter le solde migratoire à 17 000 personnes afin de préserver les ressources naturelles ? Qu’est ce qui a été entrepris pour rassurer ces Suisses qui se sentent oppressés par le spectaculaire développement économique de ces dernières années ?

Rien. Pire que cela, on ne sait toujours pas précisément comment sera appliqué le nouvel article constitutionnel 121a. Le Conseil fédéral consulte, essaie de voir si un mécanisme d’application est possible sans dénoncer l’accord bilatéral sur la libre-circulation des personnes avec l’Union européenne. Mais il ne peut pas prendre l’engagement que le solde migratoire baissera à un niveau (lequel d’ailleurs?) jugé acceptable.

Il le peut d’autant moins que dans l’incertitude sur leurs possibilités d’engager à terme, les entreprises ne se sont pas privées de recruter abondamment sur le marché du travail européen depuis février dernier. Face à la demande de qualification que requière une économie de pointe comme la nôtre, la préférence nationale peine à s’imposer comme un impératif dans les services de « ressources humaines ».

Lors de la votation de février, un solde migratoire annuel de 80 000 était considéré comme inacceptable. Il va flirter avec les 100 000 d’ici la fin de l’année.

On peut bien sûr observer que l’UDC a menti au peuple en prétendant que son initiative contre l’immigration n’aurait pas d’impact sur les accords bilatéraux, garantissant un accès harmonieux des Suisses aux marchés européens. On peut aussi dire que Ecopop est un texte néocolonial raciste. Tout cela est vrai.

Mais il y a fort à parier que ces arguments rationnels ne convainquent pas. Ecopop pourrait ravir la double majorité du peuple et des cantons. Ce sera « rebelote », et ce sera économiquement, diplomatiquement, mais aussi pour les valeurs humanistes de la Suisse, une catastrophe. A force de jouer la montre, de ne pas traiter les problèmes, et de ne pas s’entendre, les milieux politiques et économiques ont pris le risque de voir les bombes tomber à répétition.

* Texte peru en italien dans Il Caffè du 26 octobre

Forfaits fiscaux: gare au Röstigraben

Dans le Sonntagsblick, il y avait dimanche dernier un article sur la péréquation financière entre cantons, plus précisément la raz-le-bol des cantons de Nidwald, Schwytz, Zurich, Bâle et Zoug contraints de financer le canton de Berne, représenté sous la forme d’un ours gourmand avalant un milliard de francs (le record national). Pas un mot sur le fait que Vaud et Genève, les deux seuls contributeurs romands, sont aussi un peu légèrement agacés d’avoir à payer pour des cantons alémaniques:

– a). qui ont cassé la libre-circulation des personnes le 9 février dernier

– b). qui envisagent de bannir l’enseignement du français de l’école primaire.

Vaud et Genève sont certes mentionnés comme cantons donateurs dans un tableau mais l’avis des Romands dans  cette affaire n’est pas considéré comme digne d’être mentionné.

Huit pages plus loin, un autre article est consacré aux forfaits fiscaux, enjeu de la votation du 30 novembre prochain. Il donne notamment l’avis de quelques entrepreneurs de droite qui sont contre leur maintien, et donc pour l’abolition proposée par l’initiative de la gauche. Un autre petit tableau indique que Vaud, Genève et le Valais sont les cantons qui profitent le plus de cette possibilité fiscale.

Aucun lien n’est établi sur la capacité contributive de Vaud et de Genève et cette niche fiscale concédée de longue date aux riches étrangers nomades.

Ceux qui en Suisse romande défendent le forfait fiscal sont avertis:  si l’on ajoute à l’électorat de gauche qui abohorre le forfait, symbole de l’inéquité fiscale, les cantons qui l’ont déjà aboli (ZH, AR, SH, BS, BL), puis ceux qui ne le pratiquent guère, les milieux de droite alémanique peu enclins à concéder des cadeaux fiscaux aux Romands et à respecter la diversité du fédéralisme, il y aura un tonitruant Röstigraben fiscal le 30 novembre au soir.

Ce serait assez piquant qu’après avoir perdu sur 1:12 et le salaire minimum, le parti socialiste finisse par faire passer une de ses initiatives, mais sur le dos des Romands…

Conseil fédéral: l’impossible vœu de Toni Brunner

Dans une récente interview au quotidien Le Temps, Toni Brunner revendique deux sièges pour le Conseil fédéral si l’UDC demeure, après les élections fédérales de 2015, le premier parti de Suisse.

Le président de l’UDC se garde bien de dire qui pourrait être ce nouvel élu. Il n’indique pas clairement non plus qu’un second siège UDC devrait être confié à un Latin, et il omet de dire quel parti devrait lui cèder la place.

Il est normal qu’un président de parti revendique plus de pouvoir. Tous le font. Personne ne s’engage dans la bataille électorale pour rechercher moins d’influence. Mais il est assez piquant de lire ce vœu alors que l’UDC vient de perdre un siège au Conseil d’État neuchâtelois. C’est en effet le libéral-radical Laurent Favre qui a été élu dimanche dernier en remplacement d’Yvan Perrin, contraint de démissionner pour raison de santé. Le candidat de l’UDC n’a recueilli que 17 % des voix.

Le premier parti de Suisse a un gros problème de relève. Lorsqu’il s’agit de gagner des places dans les législatifs, il est très fort. Mais lorsqu’il s’agit de mettre en orbite des hommes et des femmes d’exécutif, il est particulièrement faible. Il ne dispose pas du personnel adéquat, c’est à dire de politiciennes et de politiciens expérimentés, aptes à gouverner avec les autres partis.

Ueli Maurer respecte mieux que Christoph Blocher la collégialité, mais il flirte souvent avec la limite. Il a la légitimité pour lui, mais pas l’efficacité.

La Suisse peut-elle se permettre d’avoir un deuxième Ueli Maurer au gouvernement, un deuxième monsieur sympathique, mais un peu borné, pas très créatif, ni crédible ?

Si la réponse est non, alors il faut faire le deuil une bonne fois pour toutes de la formule magique – proportionnelle – qui sert de référence à la composition du Conseil fédéral.

De fait, depuis 2007 et la scission entre l’UDC et le PBD, la formule magique n’existe plus. En réélisant Eveline Widmer-Schlumpf en 2011, le Parlement a confirmé son état de mort clinique. La proportionnelle, c’est la règle pour le Conseil national, mais le collège gouvernemental doit se construire sur un autre principe.

Il serait temps de passer à un gouvernement fondé sur une convergence programmatique. Une équipe de ministres qui partagent l’essentiel, c’est bien ainsi que fonctionnent les autres démocraties, qu’un parti soit majoritaire ou qu’une coalition additionne les forces idéologiquement les plus proches.

Quel sera le principal dossier de la prochaine législature ? Les relations avec l’Union européenne bousculées par le vote du 9 février dernier. Pour assurer la mise en œuvre de la norme constitutionnelle et rétablir un courant diplomatique normalisé avec Bruxelles, il faudra une équipe soudée. Il faudra donc élire le 9 décembre 2015 des conseillers fédéraux au moins acquis à la poursuite de la voie bilatérale.

Il n’y a pratiquement aucune chance que l’UDC de Toni Brunner soit en mesure de présenter un candidat latin affichant un tel engagement…

* Chronique parue dans le Caffè du 5 octobre

Le Gothard au nom de la cohésion nationale

On n’a pas fini de parler de cohésion nationale. Le vote du Conseil national en faveur d’un deuxième tunnel au Gothard ouvre la voie du referendum. Nous serons donc appelés l’an prochain à décider si nous voulons encore dépenser des milliards pour fluidifier le trafic Nord-Sud.

Il y a de bons arguments pour un deuxième tube, comme la sécurité. Mais il y en a un autre, qui était agité dès mercredi soir, qui n’est pas aussi bétonné qu’il en a l’air.

« Ce second tube, c’est une question de cohésion nationale, ont martelé maints élus tessinois. On ne peut pas couper le canton du reste de la Suisse pendant les trois ans que dureront les travaux. »

Permettez quelques obervations délicates et non politiquement correctes. Si le Tessin est excentré, ce n’est la faute de personne, c’est dû à la géographie et à l’histoire. Les Tessinois ont tort de tenter de culpabiliser les autres Confédérés, et de jouer les Calimero. La volonté de vivre ensemble a au contraire surmonté les contingences physiques, qui était autrement plus rudes au XIXème siècle qu’aujourd’hui.

J’ai écrit « les Tessinois ». Le problème avec le second tube au Gothard est qu’il n’a pas le soutien de tous les Tessinois. Dans la votation qui s’annonce, ce manque d’unanimité affaiblira les appels à dire oui « au nom de la cohésion nationale ». A cet égard, il sera intéressant de surveiller le nombre de signatures que les référendaires obtiendront au Sud du massif.

Quand les Suisses s’expriment en scrutin populaire sur le Gothard, il ne s’agit pas d’un banal objet comme les autres. Le Gothard joue un rôle particulier puisqu’il est considéré comme le berceau de l’identité nationale. Ce statut de mythe ou de paradis perdu l’emporte dans les consciences sur sa fonction d’axe Nord-Sud d’envergure continentale. C’est ce qui explique le résultat en 1994 de l’initative des Alpes, celui de 1998 sur le financement des transversales ferroviaires et celui d’Avanti en 2004. Par trois fois déjà, le souci des Confédérés de protéger la montagne d’un trafic trop intense a terrassé les exigences des automobilistes. 2015 marquera-t-il un tournant ?

La cohésion nationale invoquée est désormais perçue autrement. Dans le grand pot commun, chaque canton a pris l’habitude de regarder très précisément ce qu’il gagne ou perd. Les régions urbaines ont fait le désagréable constat suivant : des dizaines de milliards ont été investis au Gothard sans que toutes les promesses de fuidifier le trafic d’agglomération soient honorées. Il y a certes de spectaculaires bouchons au Gothard pendant les vacances et les jours fériés, mais le reste de la Suisse souffre d’engorgement tous les jours ouvrables. Au nom d’un mythe ne fausse-t-on pas les priorités ? Le débat s’annonce féroce.

*Chronique parue en italien dans l’hebdomadaire dominical tessinois Il caffè

Berset-Maillard: fin du duel

La méthode Berset aurait-elle triomphé de la méthode Maillard, a-t-il été demandé au conseiller fédéral? Le Fribourgeois a répondu habilement détester la personnalisation des enjeux.

Comme conseiller fédéral, Alain Berset a gagné. Comme socialiste, c’est un peu moins sûr, et comme Romand pas du tout, puisque l’idée d’une caisse publique progresse dans tous les cantons romands (voir l’analyse de Michel Guillaume ici).

Mais un conseiller fédéral est celui de tous les Suisses, s’il est en porte-à-faux avec ses camarades et une majorité des Romands, Alain Berset est en phase avec la majorité des Alémaniques. Pour un ministre romand, ce n’est pas un mal: il ne pourra pas passer pour le « Welesch de service » dans les prochains combats qu’il annonce pour réformer le système de santé.

Pierre-Yves Maillard a gagné du côté romand, et dans son canton en particulier. Le problème de la caisse publique, c’est qu’elle ne disposait pas d’un Maillard en Suisse alémanique, notait un assureur avant le scrutin. Le PS n’a pas de personnalité du calibre de Maillard Outre-Sarine. Jacqueline Fehr était bien seule pour défendre l’initiative.

Alain Berest et Pierre-Yves Maillard ont été chacun dans son rôle. Leur duel sur la caisse publique était programmé avant l’élection du premier au Conseil fédéral. Ils vont maintenant pouvoir passer à autre chose.

Les problèmes de gestion et de financement du système de santé restent entiers. Leur talent à tous les deux ne sera pas de trop pour imaginer de nouvelles réformes.

Caisse publique: Un pour tous, tous pour un

Les sondages nous le promettent. Le 28 septembre prochain, il y aura certainement un Roestigraben et un Polentagraben sur la caisse publique. Romands et Tessinois semblent plus enclins que les Alémaniques à souhaiter une correction du système de santé.

Ce qui est intéressant, c’est la manière dont on commente généralement ces différences. On dit que les Latins cultivent un autre rapport à l’Etat, qu’ils en attendent « plus », un peu sous l’influence du modèle français centralisé, adepte de la sécurité sociale. Etat tout puissant serait synonyme d’Etat généreux. Le préjugé que cet Etat redistributeur qui entend aider et protéger les citoyens serait trop dispendieux suit naturellement. Il est implicite.

C’est une manière très biaisée de comprendre les réalités suisses en faisant de l’opinion alémanique l’étalon de comparaison, la référence à laquelle il faudrait mesurer les différences romande ou latine.

Les attentes envers l’Etat et les institutions sont plus grandes parmi les Romands et les Tessinois, mais ce n’est pas forcément un mal. C’est une manière de concevoir la solidarité, l’égalité de traitement, la redistribution des richesses. Il s’agit également d’une marque de confiance envers la collectivité ou la société.

On peut voir dans cette tendance le fruit de l’histoire. Les cantons latins sont les derniers (à l’exception de Fribourg) à avoir rejoint la Confédération de plein droit entre 1798 et 1815 (et même 1979 pour le Jura), alors qu’auparavant ils étaient des territoires sujets. La jouissance de la souveraineté cantonale entraînerait une exigence vis-à-vis de l’Etat fédéral.

Il faut également observer que les cantons latins sont ceux qui ont le plus développé des politique sociales. Les dispositifs d’aide aux plus démunis y sont plus volontiers mis en œuvre, et les polémiques sur les « abus » bien moins virulentes.

Les cantons alémaniques se montrent au contraire souvent pingres et soupçonneux en matière d’aide sociale.  Ce qui peut créer chez ceux qui s’estiment laissés pour compte un sentiment de frustration, d’exaspération, qui a nourri en partie, c’est une hypothèse, le rejet de l’immigration dite « de masse » le 9 février dernier.

La sélection des bons risques qui est une des caractéristiques de l’actuel  système de caisses maladie mises en concurrence a cassé le principe de mutualité. La solidarité, inscrite dans la loi, n’est que de façade.

Le projet de caisse publique ne fera pas fondre les coûts de la santé, amenés à croître du fait du vieillissement de la population et de la sophistication des traitements. Mais, il permettrait de réaffirmer, en toute transparence, une certaine idée du vivre-ensemble dans le respect des besoins de chacun, plutôt que dans une jungle du chacun pour soi. Un pour tous, tous pour un, n’est-ce pas une devise précieuse ?

*Chronique parue en italien dans Il Caffè du jour

Le danger Ecopop

Après le Conseil des Etats, le Conseil national a refusé cette semaine l’initiative Ecopop sèchement.* Un verdict attendu, un scénario écrit d’avance. Ce texte veut limiter l’accroissement de la population à 0,2% sur une moyenne de trois ans. Cela signifierait que seuls 16 000 étrangers pourraient s’installer en Suisse chaque année. Alors que le solde migratoire a été de 81 000 personnes en 2013 ou qu’un canton comme Vaud estime son besoin en permis de travail à 55 000. Ecopop veut aussi que 10% du budget de l’aide au développement soit affecté à des mesures de planification familiale volontaire. Les parlementaires ont jugé ces propositions irréalistes, égoïstes, néo-colonialistes.

Ils auraient dû aller plus loin et invalider cette initiative. Mais ils ont refusé de le faire par 120 voix contre 45. Un manque de courage consternant.

Le texte ne respecte pas l’unité de la matière, il mêle immigration en Suisse et aide au développement dans le tiers monde. Mais dans le doute, l’habitude a été prise à Berne de confier au peuple le choix de trancher. La manœuvre a souvent servi d’exutoire sans conséquence.

Lors d’un colloque à Neuchâtel sur la compatibilité entre les droits populaires et le respect des droits humains qui s’est tenu récemment à Neuchâtel, le sénateur Filippo Lombardi a noté humour que «l’unité de la matière» est un concept «chewing gum» et que les critères d’invalidation des initiatives populaires gagneraient à être clarifiés.

C’est un travail de Titan que devront entreprendre le gouvernement et le parlement. Il faudra lutter contre le sentiment qui s’est installé que la démocratie directe est supérieure à la démocratie représentative. «Elire tous les quatre ans est aussi noble que de voter tous les trois mois», a souligné très justement Lombardi.

En attendant cette évolution nécessaire de notre système institutionnel (les normes de droit international supérieur vont se multiplier, pas seulement pour les droits humains ou l’eurocompatibilité, mais aussi dans le domaine environnemental), il va donc falloir combattre Ecopop devant le peuple. La votation pourrait avoir lieu cette année encore.

Ce ne sera pas facile.

Selon le sondage Sophia 2014, publié par L’Hebdo en mai dernier, 74% des Suisses pensent qu’il faudra profondément changer leur mode de vie pour des raisons écologiques. La croissance démographique inquiète également. La tendance est là, les thèses d’Ecopop recueillent une approbation très large, beaucoup plus large que le contingentement de la main d’œuvre étrangère. Reste donc à montrer que la solution n’est pas adéquate. La campagne sera compliquée par la discussion sur la mise en œuvre de l’initiative «contre l’immigration de masse» qui s’annonce tout sauf consensuelle.

* texte paru en italien dans Il Caffè. 

Triomphe des gouvernements cantonaux

Jolie démonstration ce dimanche: dans le canton de Neuchâtel le contre-projet l’emporte (60,5%), l’éolien n’est pas condamné. Dans le canton de Vaud, le contre-projet à Lavaux III s’impose également (68%), le vignoble le plus protégé de Suisse ne deviendra pas un musée figé.

Les deux Conseils d’Etat ont eu raison de ne pas abdiquer devant deux initiatives absolutistes, et de proposer une alternative plus praticable, qui laisse une marge de manoeuvre aux pouvoirs de proximité.

Le miracle ne s’est pas produit pour l’initiative de la « Marche blanche » pour que les pédophiles ne puissent plus travailler avec des enfants. La pédagogie a réduit le score, mais il était difficile de plaider la proportionnalité du droit dans un sujet aussi émotionnel. On peut juste espèrer que les vainqueurs respectent les vaincus, et cessent de les mettre au pilori parce qu’ils avaient une appéciation différente de situation.

Les votes vaudois et neuchâtelois de ce dimanche prouvent au moins qu’il vaut la peine d’essayer, que le souverain peut se laisser convaincre, que le pragmatisme a encore de beaux jours devant lui et que les gouvernements cantonaux ne souffrent pas du même discrédit que le Conseil fédéral.

Avions de combat: 1993/2014

A  21 ans de distance, six  cantons ont basculé dans le camp du refus à de nouveaux avions de combats: Neuchâtel, Valais, Vaud, Zurich, Schaffhouse  et Berne.

Le Jura, le Tessin et les deux Bâles avaient, eux, déjà voté contre l’acquisition de  FA/18.

Le 6 juin 1993, 57,2% des votants s’étaient opposés à l’initiative pour une Suisse sans nouveaux avions de combat, alors que le Gripen est aujourd’hui boudé par 53,4%. 

Jamais les Suisses n’avaient refusé à l’armée les moyens de s’équiper comme elle estimait en avoir besoin.

Salaire minimum: les jeunes socialistes meilleurs que les syndicats

Sur le salaire minimum, la défaite des syndicats est sèche.

Avec 77% de refus, ils ont fait moins bien que les jeunes socialistes et leur 1:12 en novembre dernier (65% de non).

Le mythe du partenariat social a été plus fort, même si un employé sur deux n’est pas couvert par une CCT. L’attachement à un état libéral, qui ne se mêle pas de l’économie, est une caractéristique de fond dans les choix de votations des Suisses.

Après Minder et le 9 février, les milieux économiques ont retrouvé un moyen de convaincre de ne pas casser les conditions-cadre qui font le succès de la Suisse. Ce n’est pas encore la grande réconciliation, mais c’est un premier pas.

La question de l’équité salariale reste entière. Ce vote sec ne l’enterre pas, on peu même craindre une radicalisation.

Si la stratégie de l’initiative a échoué, alors restera celle de la grève pour amener certains patrons à mieux redistribuer les fruits de la croissance.