Le Gothard au nom de la cohésion nationale

On n’a pas fini de parler de cohésion nationale. Le vote du Conseil national en faveur d’un deuxième tunnel au Gothard ouvre la voie du referendum. Nous serons donc appelés l’an prochain à décider si nous voulons encore dépenser des milliards pour fluidifier le trafic Nord-Sud.

Il y a de bons arguments pour un deuxième tube, comme la sécurité. Mais il y en a un autre, qui était agité dès mercredi soir, qui n’est pas aussi bétonné qu’il en a l’air.

« Ce second tube, c’est une question de cohésion nationale, ont martelé maints élus tessinois. On ne peut pas couper le canton du reste de la Suisse pendant les trois ans que dureront les travaux. »

Permettez quelques obervations délicates et non politiquement correctes. Si le Tessin est excentré, ce n’est la faute de personne, c’est dû à la géographie et à l’histoire. Les Tessinois ont tort de tenter de culpabiliser les autres Confédérés, et de jouer les Calimero. La volonté de vivre ensemble a au contraire surmonté les contingences physiques, qui était autrement plus rudes au XIXème siècle qu’aujourd’hui.

J’ai écrit « les Tessinois ». Le problème avec le second tube au Gothard est qu’il n’a pas le soutien de tous les Tessinois. Dans la votation qui s’annonce, ce manque d’unanimité affaiblira les appels à dire oui « au nom de la cohésion nationale ». A cet égard, il sera intéressant de surveiller le nombre de signatures que les référendaires obtiendront au Sud du massif.

Quand les Suisses s’expriment en scrutin populaire sur le Gothard, il ne s’agit pas d’un banal objet comme les autres. Le Gothard joue un rôle particulier puisqu’il est considéré comme le berceau de l’identité nationale. Ce statut de mythe ou de paradis perdu l’emporte dans les consciences sur sa fonction d’axe Nord-Sud d’envergure continentale. C’est ce qui explique le résultat en 1994 de l’initative des Alpes, celui de 1998 sur le financement des transversales ferroviaires et celui d’Avanti en 2004. Par trois fois déjà, le souci des Confédérés de protéger la montagne d’un trafic trop intense a terrassé les exigences des automobilistes. 2015 marquera-t-il un tournant ?

La cohésion nationale invoquée est désormais perçue autrement. Dans le grand pot commun, chaque canton a pris l’habitude de regarder très précisément ce qu’il gagne ou perd. Les régions urbaines ont fait le désagréable constat suivant : des dizaines de milliards ont été investis au Gothard sans que toutes les promesses de fuidifier le trafic d’agglomération soient honorées. Il y a certes de spectaculaires bouchons au Gothard pendant les vacances et les jours fériés, mais le reste de la Suisse souffre d’engorgement tous les jours ouvrables. Au nom d’un mythe ne fausse-t-on pas les priorités ? Le débat s’annonce féroce.

*Chronique parue en italien dans l’hebdomadaire dominical tessinois Il caffè

Berset-Maillard: fin du duel

La méthode Berset aurait-elle triomphé de la méthode Maillard, a-t-il été demandé au conseiller fédéral? Le Fribourgeois a répondu habilement détester la personnalisation des enjeux.

Comme conseiller fédéral, Alain Berset a gagné. Comme socialiste, c’est un peu moins sûr, et comme Romand pas du tout, puisque l’idée d’une caisse publique progresse dans tous les cantons romands (voir l’analyse de Michel Guillaume ici).

Mais un conseiller fédéral est celui de tous les Suisses, s’il est en porte-à-faux avec ses camarades et une majorité des Romands, Alain Berset est en phase avec la majorité des Alémaniques. Pour un ministre romand, ce n’est pas un mal: il ne pourra pas passer pour le « Welesch de service » dans les prochains combats qu’il annonce pour réformer le système de santé.

Pierre-Yves Maillard a gagné du côté romand, et dans son canton en particulier. Le problème de la caisse publique, c’est qu’elle ne disposait pas d’un Maillard en Suisse alémanique, notait un assureur avant le scrutin. Le PS n’a pas de personnalité du calibre de Maillard Outre-Sarine. Jacqueline Fehr était bien seule pour défendre l’initiative.

Alain Berest et Pierre-Yves Maillard ont été chacun dans son rôle. Leur duel sur la caisse publique était programmé avant l’élection du premier au Conseil fédéral. Ils vont maintenant pouvoir passer à autre chose.

Les problèmes de gestion et de financement du système de santé restent entiers. Leur talent à tous les deux ne sera pas de trop pour imaginer de nouvelles réformes.

UDC: un problème de relève

2013 avait été marqué par une percée de l’UDC qui faisait son retour dans les exécutifs romands, avec l’élection d’Yvan Perrin à Neuchâtel, et celle d’Oscar Freysinger en Valais.

2014 sonne le retour de balancier. Raymond Clottu n’a reçu que 17% des voix face à Laurent Favre. Le Conseil d’Etat neuchâtelois compte à nouveau deux libéraux-radicaux aux cotés des trois socialistes.

Les grandes ambitions de l’UDC buttent décidément sur un problème de relève. 

Pour un parti qui recueille autant de suffrages, entre 15 et 30% selon les régions, c’est problématique. Mais ce ne sont pas les citoyens qui sont infidèles ou inconstants, c’est l’UDC qui n’est pas à la hauteur.

Par contraste, le PLR assure en toutes circonstances. Comme le PS ou le PDC, il n’a aucune peine à proposer des candidats de stature gouvernementale.

Cette faiblesse de l’UDC est peut-être soluble dans le temps, de nouvelles générations émergent. En attendant, les autres partis gardent une longueur d’avance. A un an des élections fédérales, c’est de bonne augure pour les libéraux-radicaux en Suisse romande. 

Caisse publique: Un pour tous, tous pour un

Les sondages nous le promettent. Le 28 septembre prochain, il y aura certainement un Roestigraben et un Polentagraben sur la caisse publique. Romands et Tessinois semblent plus enclins que les Alémaniques à souhaiter une correction du système de santé.

Ce qui est intéressant, c’est la manière dont on commente généralement ces différences. On dit que les Latins cultivent un autre rapport à l’Etat, qu’ils en attendent « plus », un peu sous l’influence du modèle français centralisé, adepte de la sécurité sociale. Etat tout puissant serait synonyme d’Etat généreux. Le préjugé que cet Etat redistributeur qui entend aider et protéger les citoyens serait trop dispendieux suit naturellement. Il est implicite.

C’est une manière très biaisée de comprendre les réalités suisses en faisant de l’opinion alémanique l’étalon de comparaison, la référence à laquelle il faudrait mesurer les différences romande ou latine.

Les attentes envers l’Etat et les institutions sont plus grandes parmi les Romands et les Tessinois, mais ce n’est pas forcément un mal. C’est une manière de concevoir la solidarité, l’égalité de traitement, la redistribution des richesses. Il s’agit également d’une marque de confiance envers la collectivité ou la société.

On peut voir dans cette tendance le fruit de l’histoire. Les cantons latins sont les derniers (à l’exception de Fribourg) à avoir rejoint la Confédération de plein droit entre 1798 et 1815 (et même 1979 pour le Jura), alors qu’auparavant ils étaient des territoires sujets. La jouissance de la souveraineté cantonale entraînerait une exigence vis-à-vis de l’Etat fédéral.

Il faut également observer que les cantons latins sont ceux qui ont le plus développé des politique sociales. Les dispositifs d’aide aux plus démunis y sont plus volontiers mis en œuvre, et les polémiques sur les « abus » bien moins virulentes.

Les cantons alémaniques se montrent au contraire souvent pingres et soupçonneux en matière d’aide sociale.  Ce qui peut créer chez ceux qui s’estiment laissés pour compte un sentiment de frustration, d’exaspération, qui a nourri en partie, c’est une hypothèse, le rejet de l’immigration dite « de masse » le 9 février dernier.

La sélection des bons risques qui est une des caractéristiques de l’actuel  système de caisses maladie mises en concurrence a cassé le principe de mutualité. La solidarité, inscrite dans la loi, n’est que de façade.

Le projet de caisse publique ne fera pas fondre les coûts de la santé, amenés à croître du fait du vieillissement de la population et de la sophistication des traitements. Mais, il permettrait de réaffirmer, en toute transparence, une certaine idée du vivre-ensemble dans le respect des besoins de chacun, plutôt que dans une jungle du chacun pour soi. Un pour tous, tous pour un, n’est-ce pas une devise précieuse ?

*Chronique parue en italien dans Il Caffè du jour

Trierweiler : les journalistes ne disent pas merci

L’attitude de Valérie Trierweiler est une catastrophe pour les femmes journalistes.

Résumons sa carrière :

elle a couché pour avoir des informations exclusives

– parvenue au sommet de l’État par la grâce d’une liaison, elle a prétendu continuer à exercer son métier de journaliste, ne saisissant pas qu’elle pataugeait en plein conflit d’intérêts

– elle a mis publiquement dans l’embarras son compagnon président (affaire du twitt contre Ségolène Royal)

– une fois répudiée, elle déballe tout, au lieu de se taire et de rentrer dans le rang

elle utilise son jounal (Paris-Match) pour régler des comptes privés

Ce faisant, elle viole toutes les règles déontologiques de la profession. Elle compromet aussi les relations personnelles qui peuvent s’établir entre journalistes et politiciens (comment faire encore confiance aux premiers?)

Une vraie peste, un poison, on comprend que François Hollande s’en soit séparée.

Qu’elle se taise !  Car ses consoeurs ne lui disent pas merci.